Oui, nous le pouvons !

Sa vie aurait de quoi faire pâlir les plus grands chefs d’État, ses anecdotes, croustillantes parfois, rendraient verts de jalousie ceux qui aiment à s’immiscer dans les arcanes du pouvoir. Marek Halter n’est pas simplement un nom que beaucoup connaissent pour ses engagements dans des œuvres humanitaires, dans des associations à présent devenues les symboles des luttes contemporaines contre la pauvreté, l’exclusion sociale et le racisme (SOS Racisme, Ni Putes ni soumises, l’ONU, etc.) Il est avant tout un être humain gorgé d’expérience, qui connut le ghetto de Varsovie, la fuite face à la montée du nazisme, une jeunesse misérable en Ouzbékistan, la dictature militaire de Perón en Argentine, le premier conflit européen après la seconde guerre mondiale – l’explosion de la Yougoslavie qui s’en suivit – et qui, surtout, fut l’un des premiers témoins du déchirement Israélo-palestinien. Son indignation est un chant à elle toute seule, le chant d’une voix qui claironne à tous vents, envers et contre tous parfois, que ce monde où règne l’injustice n’est garant d’aucune légitimité. Et son indignation, profonde et humaniste, qui naît indéniablement de sa culture humaine et du traumatisme de son enfance, est exaltée par les millions d’images que nous déversent les médias sur les conflits qui pilonnent les terres et bombardent les cœurs.

faites le, Marek Halter, éditions Kero

Si Faites-le ! prend la forme d’une autobiographie, une série d’anecdotes de l’auteur sur ses rencontres, fortuites ou préméditées avec les grands de ce monde, c’est que Marek Halter plonge dans sa propre histoire pour reconstituer la genèse de son engagement humanitaire. Il s’agit pour l’auteur de puiser dans les sentiers de sa vie personnelle pour expliquer les chemins qui ont tracé l’indignation passionnée de cet homme à l’allure de géant. Le voici donnant des conseils sur l’immigration à Nicolas Sarkozy, prenant le thé avec Jean-Paul II, rencontrant Yasser Arafat pour tenter de régler l’un des plus épineux conflits de la planète, tout comme Daniel Cohn-Bendit, Bernard Henri-Levy, Bernard Pivot,  Harlem Désir, Irena Sendler – Juste parmi les nations –, etc., etc.

Son caractère populaire et sa forte médiatisation dans tout ce qu’il entreprend lui permettent de transmettre un message clair et concis, puissant et vibrant à la fois, celui d’une cohésion européenne et humaine pour lutter contre tous les maux qui pourraient secouer nos démocraties. Homme de foi, il sait également que la haine n’engendre que la haine et que « la violence commence là où s’arrête la parole » –, il en a d’ailleurs fait l’expérience. Grand orateur, il sait utiliser les bons mots. Il évoque à plusieurs reprises le pouvoir du verbe, auquel ne doit se substituer la violence, porteuse de haine et génératrice de guerres. Il sait d’ailleurs comment écrire cette autobiographie et nous exhorter à nous engager, avec des mots d’une simplicité presque enfantine, mais qui ne portent aucun préjudice au fond : fallait-il, pour apostropher un maximum de personnes, écrire du Proust dans un français du XIX° siècle ? Il sait que les mots les plus simples sont parfois les plus efficaces. Quand il se retrouve sur le plateau télévisé de Marc-Olivier Fogiel, bouleversé par la récente explosion des actes antisémites en France – plus de 60 ans après l’Holocauste –, il refuse de parler de sa nouvelle trilogie littéraire et demande au journaliste, aux gens présents sur le plateau et aux téléspectateurs de crier. Assourdi par la cacophonie que produit ce déchainement de décibels, il se rend compte, avec stupeur, que tous ont crié en même temps que lui. Contre la bêtise et la haine.

Son autobiographie est imprégnée d’une culture humaine, celle d’un homme qui a le sens du devoir, la capacité de s’émouvoir des malheurs des autres, un altruisme sans borne et une mémoire qu’il entretient – car sans mémoire, sans souvenirs, l’Homme est condamné à répéter les mêmes erreurs. Il clame, d’une seule voix et d’une seule traite, puissante et envoûtante, ce que beaucoup veulent mais n’oseraient faire : réagir, l’esprit libre de s’affranchir de la torpeur qui glace nos corps et rend ternes nos esprits. Faites-le ! est un appel révoltant, insistant à nous joindre aux bâtisseurs de sociétés nouvelles, ceux qui construisent l’édifice idéologique qui fera de demain un jour un peu meilleur qu’hier. Pourquoi sommes-nous si embourbés dans nos petites vies tranquilles ? Marek Halter ne le dit pas, mais un rapide coup d’œil de nos sociétés permettrait d’en connaître les raisons. Parce que nous possédons tout. Nantis qui avons tout, et finalement si peu de choses, nous n’avons pas connu la faim et la misère, comme Marek Halter put la connaître. L’auteur ne dénonce en aucun cas ces peuples paralysés, il pointe simplement du doigt la difficulté qu’a l’Homme à se surpasser, à prendre les rênes de sa vie. Pourquoi l’Homme est un piètre rêveur ? Parce que comme l’explique Marek Halter, nous ne croyons pas en notre capacité de faire changer les choses, à notre niveau, comme une goutte d’eau dans un océan de conflits. Et pourtant, nous le POUVONS.

Et moi, je ne peux que vous exhorter à lire Faites-le !.

Par Maxime

Je tenais à remercier Cafe-Powell et les éditions Kero pour l’envoi de ce livre, pas uniquement par principe, mais parce que Faites-le ! que j’ai lu d’une traite est l’une de ces lectures qui remettent les idées en place, qui nous permettent d’oublier nos petits malheurs personnels et nous exhortent à regarder plus loin, à avoir cette vision universelle qui nous rend conscients de la nécessité d’agir, et vite.

Faites-le !, Marek Halter. éditions Kero, 2013

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