Avec trois brins de laine (on peut refaire le monde), une fable intemporelle !

Avec trois brins de laine (on peut refaire le monde), Yara Kono, Henriqueta Cristina, éditions des Éléphants

ALBUM JEUNESSE — Née et habitant au Portugal, Henriqueta Cristina a enseigné pendant plus de 30 ans tout en racontant des histoires vraies. Avec trois brins de laine en fait partie et raconte l’histoire vraie d’une famille proche de la sienne. Yara Kono, de son côté, fait partie de l’équipe éditoriale de Planeta Tangerina, une structure protugaise, pour laquelle elle a illustré 7 albums.

A la maison, papa et maman sont de plus en plus sombres, et ont de plus en plus souvent aux lèvres des mots comme « guerre », « exil », « prison » ou « peur ». Une nuit, la famille s’enfuit et rejoint un pays. Un pays où la pauvreté n’existe pas et où tous les enfants vont à l’école. C’est merveilleux !
Sauf qu’en réalité, tout n’est pas si rose… Les bâtiments de la ville ne sont que d’interminables cubes gris sans âme et sans personnalité. Pire, il n’y a pas de choix dans les vêtements : seuls les pulls verts, gris et orange semblent autorisés. Alors, à la maison, papa et maman se mettent à avoir de nouveau cette petite ride annonciatrice de mauvais temps au milieu du front. Jusqu’à ce que la mère ait une idée et insuffle un petit vent de révolution et de liberté dans cette sinistre cité.

La postface le révèle : l’histoire est celle d’une famille portugaise fuyant la dictature fasciste de Salazar pour rejoindre la Tchécoslovaquie où, en 1968, elle connaît le Printemps de Prague – elle ne rentrera au Portugal qu’après la Révolution des Œillets, en 1974. Henriqueta Cristina et Yara Kono racontent pourtant une histoire dénuée de repères spatiaux et temporels, offrant au texte et au dessin une portée toute universelle et, hélas, atemporelle.

Le texte est très musical, répétant certaines phrases qui créent une sorte de refrain rythmant le texte. Le dessin, de son côté, tout en formes géométriques souligne à la fois l’angoisse du premier pays, l’uniformité aliénante du second, alors que les couleurs éclatantes viennent souligner idéalement le vent de liberté que la mère contribue à faire souffler !

Henriqueta Cristina et Yara Kono signent un album sensible et intelligent évoquant avec beaucoup de justesse la peur, la répression et l’immigration – non pas le voyage en tant que tel, mais l’arrivée dans un nouveau pays. Ce conte moral invite à réfléchir sur la migration, l’arrivée dans un nouveau pays, l’accueil réservé aux migrants et, enfin, aux libertés individuelles. En d’autres termes, un album à lire sans modération, dès 6 ans et sans limite d’âge !

Avec trois brins de laine (on peut refaire le monde), Henriqueta Cristina & Yara Kono. Editions des Éléphants, 18 février 2016.

A propos Oihana 710 Articles
Lectrice assidue depuis son plus jeune âge, Oihana apprécie autant de plonger dans un univers romanesque, que les longues balades au soleil. Après des études littéraires, elle est revenue vers ses premières amours, et se destine aux métiers du livre.

Soyez le premier à commenter

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée.


*


Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.