Pourquoi est-ce un chef d’oeuvre ? 50 longs-métrages d’animation expliqués

Cérémonie des Oscars, festival du film d’animation d’Annecy, Nuits magiques de la région bordelaise… désormais le film d’animation a acquis ses lettres de noblesse, et se voit même récompensé. Mais il n’en a pas toujours été de même, en témoigne cet extrait de l’introduction de Gersende Bollut à son essai sur les films d’animation :
« Idées reçues.
L’animation, c’est pour les enfants.
Le cliché le plus tenace sur l’animation reste la cible à laquelle elle s’adresse, ou que le grand public croit identifier comme telle. Durant plusieurs décennies, celui-ci n’a eu accès qu’à la partie immergée de l’iceberg, constituée des classiques Disney, hors lesquels point de salut. Non seulement l’auteur de Blanche-Neige n’est pas le seul, ni le premier (quand bien même il a mis au point moult innovations et adapté ses productions à l’ère du temps), mais bon nombre de films de tous horizons s’adressent aussi aux adultes, quand ils ne leur sont pas exclusivement réservés (ainsi Fritz le chat, interdit aux moins de 18 ans). Cantonner l’animation au seul public enfantin revient à prétendre que la BD se résume aux « petits mickeys », alors même que Bilal, Moebius ou Hugo Pratt lui ont donné ses lettres de noblesse. Il en est de même pour l’animation, avec des figures tutélaires reconnues telles John Lasseter ou Hayao Miyazaki, mais aussi nombre d’auteurs majeurs dont les noms restent souvent identifiés des seuls férus du genre. Pêle-mêle : Alexandre Alexeïeff, Ray Harryhausen, Jiří Trnka, Norman McLaren, Mamoru Oshii, Youri Norstein, Chuck Jones, Jan Švankmajer ou Don Bluth. Ce livre souhaite ainsi signifier qu’un tel raccourci témoigne d’un profond irrespect pour ces créateurs. »
Ce nouveau titre de la collection « Pourquoi est-ce un chef d’oeuvre ? » s’attelle donc à rendre ses lettres de noblesse à un genre qui a longtemps été injustement décrié.

longs-métrages

 Gersende Bollut, journaliste de profession et spécialiste du 7e art, propose donc une sélection de 50 œuvres méritant, selon lui, d’accéder à la postérité, tout en annonçant immédiatement qu’il ne vise pas ici l’exhaustivité (et laissant la possibilité d’un second volume). Les œuvres ne sont pas classées par ordre de préférence (on n’est pas dans la logique du top 50), et ont été choisies tant pour leur intérêt historique, leurs récompenses, que leur contribution à l’art de l’animation. Tout en se limitant à 50 œuvres, l’auteur a tâché de couvrir au mieux la période, tout en variant genres, réalisateurs, producteurs, esthétiques et projets.

Passé l’introduction exposant clairement le projet, l’auteur propose quelques définitions claires, bien pensées, et visant à ne pas perdre le néophyte en cours de route : après cela, vous n’ignorerez plus rien des secrets des techniques d’animation et stop-motion, rotoscopie et autres films de silhouettes n’auront plus de secrets pour vous. La période choisie couvre les longs-métrages des origines (le premier, Les Aventures du prince Ahmed de Lotte Reiniger date de 1926) aux années 2000 (le dernier étant Ernest et Célestine, de Benjamin Renner, Vincent Patar et Stéphane Aubier, produit en 2012).

L’auteur consacre deux pages à chaque film, qui rappellent les caractéristiques techniques, une petit biographie-filmographie du (ou des) réalisateur(s) et, enfin, un petit texte justifiant la place du-dit film dans l’ouvrage. Sont donc abordées les questions du thème choisi – Tokyo godfathers, de Satoshi Kon, véritable fable de Noël contemporaine et infiniment humaine -, du graphisme particulier – Les Triplettes de Belleville, de Sylvain Chomet, dont sont mis en avant le trait particulier et l’absence de dialogues -, ou l’importance dans l’histoire du cinéma – Les Aventures du Prince Ahmed, considéré comme le premier long-métrage d’animation de l’histoire du cinéma. C’est aussi clair que complet, et la seule chose qu’on pourrait reprocher à l’ouvrage, c’est d’être un peu court : on en apprendrait volontiers un peu plus sur chaque long-métrage, tant du point de vue historique qu’analytique. L’avantage du format court, en revanche, c’est que le lecteur lit l’essai sans se lasser : c’est direct, concis, et bien présenté.

Voilà donc un essai-documentaire facile et agréable à lire, idéal pour parfaire sa connaissance cinématographique. Très accessible, il plaira aux néophytes ; son souci du détail et d’un panorama varié devrait également combler les ténors du genre. Dans les deux cas, ce qui est sûr, c’est que vous aurez envie de découvrir les titres que vous ne connaissez pas, et de revoir ceux que vous avez déjà vus !

Pourquoi est-ce un chef d’œuvre ? 50 longs-métrages d’animations expliqués, Gersende Bollut. Eyrolles, 2014. 

Par Oihana

A propos Oihana 710 Articles
Lectrice assidue depuis son plus jeune âge, Oihana apprécie autant de plonger dans un univers romanesque, que les longues balades au soleil. Après des études littéraires, elle est revenue vers ses premières amours, et se destine aux métiers du livre.

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