Lorsqu’on lit la quatrième de couverture de Rue du Bonheur, on ne peut s’empêcher de penser à La Liste de mes envies de Grégoire Delacourt (Jean-Claude Lattès, 2012), roman dans lequel une mercière décroche le gros lot. Mais dans le roman d’Anna Fredriksson, la personne qui gagne à la loterie n’est pas mercière, mais travaille dans un centre pour toxicomanes, et le gros lot n’est finalement qu’un prétexte pour explorer les relations familiales dans un contexte de famille recomposée.
Johanna, l’héroïne, est mère célibataire : elle vit dans une toute petite ville, où elle est née et a grandi, avec ses deux filles, Agnes et Sara, adolescentes. Le quotidien n’est pas très rose : Johanna a des soucis d’argent, depuis que Calle, son ex-mari, a décidé de cesser de lui donner plus que la pension alimentaire prévue après leur divorce. Par ailleurs, Sara est harcelée dans son collège, et personne ne semble prendre la situation vraiment au sérieux, si ce n’est Johanna.
Et donc un jour, Johanna gagne à la loterie. Une très grosse somme. D’un coup, tout devient possible : Johanna s’installe à Stockholm, l’impressionnante capitale suédoise, pour débuter une nouvelle vie. Commence alors une étrange cohabitation avec Calle, son ex-mari, qui vit tout à côté. Il faut réinventer l’équilibre familial : Calle a oublié ce que c’est que d’être père au quotidien. Il a par ailleurs refait sa vie avec la belle et brillante Fanny.
Grâce à cette belle palette de personnages, Anna Fredriksson dresse le portrait dynamique d’une famille recomposée moderne, avec ses soucis et ses petits bonheurs. Le thème est très actuel : comment recomposer les relations familiales après un divorce ? Comment une nouvelle compagne doit-elle se comporter avec les filles adolescentes de son conjoint ? et avec l’ex-femme ? Les situations sonnent juste, et le personnage de Johanna, en mère dévouée, touche le lecteur. Prête à tout pour défendre Sara contre les collégiennes qui la briment, elle n’hésite pas à se rapprocher de son ex-mari pour permettre à ses filles de voir davantage leur père. Mais Anna Fredriksson ne donne pas seulement voix à Johanna : Calle et Fanny ont également leur mot à dire. Nous découvrons un Calle avide d’ascension sociale, désireux de tourner le dos à un passé douloureux, et une Fanny en proie au doute, ne sachant comme se débrouiller avec cette situation inédite. Une narration originale et bienvenue !
Par petites touches, c’est une ville qui se dévoile : Stockholm. Tantôt impitoyable et hors de prix, ou encore accueillante et vivante, la capitale suédoise est le théâtre d’une nouvelle vie, tant pour Calle qui y a construit sa carrière que pour Johanna qui permet ainsi à ses filles une vie loin des brimades. L’immeuble de Stockholm, on le visualiserait presque, chaleureux et accueillant, comme se le représente Calle, quand il observe de nuit la façade de l’immeuble et ses lumières.
Récit pleinement réussi, Rue du Bonheur est un roman qui se dévore avec grand plaisir.
Rue du Bonheur, Anna Fredriksson. Denoël, mai 2014. Traduit du suédois par Carine Bruy.
Je ne connaissais pas du tout mais je le note, j’aime beaucoup ce style de lectures pour l’été 🙂
Je viens de le finir et je trouve ta chronique très juste ! 🙂
Merci ! J’ouvre l’œil pour ta chronique 🙂