Roméo et Juliette. Juliette et Roméo. Ces amants maudits, immortalisés par Shakespeare, ont donné lieu à des centaines d’interprétations : musiques, ballets, films, romans, nombreux sont les créateurs à s’être inspirés du mythe.
Avec son diptyque Juliette forever et Roméo forever, Stacey Jay s’inscrit dans une longue tradition. Mais, plutôt que de transposer l’histoire en fable moderne, l’auteur s’empare d’une tradition fantastique – celle des anges gardiens et des âmes malveillantes – qu’elle mêle au mythe. Amateurs de la version shakespearienne, préparez-vous à une ambiance dépaysante.
Vérone, 1304. La romance de Roméo Montaigu et Juliette Capulet s’achève dans le sang et les larmes. Exit les amants maudits de la belle cité italienne.
Seulement voilà. Roméo et Juliette ne sont pas tout à fait morts. Car si Roméo a trahi, et s’est acoquiné avec les Mercenaires de l’Apocalypse – chargé de moissonner le maximum d’âmes possible – les mânes de Juliette ont été sauvées du néant par les Ambassadeurs de la Lumière – chargés d’aider le maximum de personnes à trouver leur âme sœur. Depuis, les anciens amants, devenus ennemis, se battent l’un contre l’autre, par âmes sœurs interposées. Et cela fait 700 ans que Roméo s’acharne à retrouver l’âme de Juliette pour faire passer le corps qu’elle habite de vie à trépas. C’est quasiment son sport préféré.
États-Unis, de nos jours. Juliette est chargée de s’occuper d’Arielle, afin de l’empêcher de faire des choix désastreux, et lui faire rencontrer son âme sœur – de préférence avant que Roméo ou tout autre Mercenaire ne débarque pour faire le ménage. Depuis le temps qu’elle fait ça, Juliette est assez douée. La seule chose qu’elle n’avait pas prévue, ce serait de tomber sur une âme qui lui plaît bien, à elle aussi – ce qui, on s’en doute, ne plaît pas du tout à Roméo, loin de là.
S’engage donc un chassé-croisé des âmes éternelles, croisant sur leur route des personnalités qui ne leur sont pas inconnues : le moine, Benvolio ou la Nourrice font quasiment partie du décor.
Surfant donc sur la mode des histoires à tendances fantastiques, Stacey Jay s’approprie le mythe de l’amour éternel de Roméo et Juliette, tout en en proposant une transposition originale et audacieuse : le style est vif, l’intrigue prenante, et les références à l’œuvre de base feront sourire le lecteur. Le suspens, de plus, est maintenu de bout en bout, et la fin s’avère aussi surprenante que recherchée ! Juliette forever est un roman que l’on lit facilement et avec grand plaisir.
Tout se gâte avec le second volet du diptyque, Roméo forever : accordant un tome à chacun de ses protagonistes, l’auteur développe l’histoire personnelle des amants maudits. Et autant celle de Juliette était intéressante et bien était intéressante et bien écrite, autant celle de Roméo sombre dans la mièvrerie la plus crasse. Dès lors, il n’est plus question que de romance : la transposition passe au second plan, de même que l’intrigue autour de la lutte entre Mercenaires et Ambassadeurs, qui n’est plus qu’un vague prétexte à un suspens poussif. Les péripéties ne surprennent plus, l’ambiance fantastique non plus, et on devine rapidement où l’auteur souhaite en venir, et comment cela va évoluer. Ceci étant, la fin est originale, quoique pas assez détaillée, et rappelle les bons points du premier tome.
En transposant le mythe de Roméo et Juliette dans un univers contemporain, et en lui adjoignant des aspects fantastiques et originaux, Stacey Jay propose une réécriture audacieuse, et qui devrait plaire aux adolescents auxquels elle destine son roman. Dommage, cependant, que le second tome soit nettement en dessous du premier, qui était pourtant très prometteur. À lire si vous aimez les transpositions originales, à éviter – surtout le tome 2 – si la romance vous donne de l’urticaire !
Juliette forever, Stacey Jay. Milan macadam, 2012. Roméo forever, Stacey Jay, Milan macadam, 2013.
Je me laisserais peut-être tentée … quand j’aurais fini mes relectures des adaptations musicales 😀