Cette année, Super 8 ouvre le bal avec L’Ombre, probablement un de leurs meilleurs titres à ce jour (et il y a du niveau !), et sans aucun doute, un de leurs plus terrifiants.
Ne faire confiance à personne. Etre prête à fuir dès que le besoin se fait sentir. C’est ainsi qu’Hannah Wilde a été élevée… dans la peur d’une entité mystérieuse et profondément maléfique, à la longévité incroyable, et capable de prendre l’apparence de n’importe qui. Lorsque le roman s’ouvre, Hannah fuit comme on le lui a appris. Son mari Nate est en train de se vider de son sang sur le siège passager de leur voiture et leur fille Leah dort à l’arrière, inconsciente des dangers qui les guettent. C’est la panique la plus totale dans l’esprit de la jeune femme car Jakab, le fléau familial, vient de les retrouver après des années de tranquillité.
Obsessionnel, capricieux et violent, Jakab poursuit la famille d’Hannah depuis des décennies, trompant et décimant ses membres génération après génération. L’histoire familiale se transmet dans de vieux carnets reliés avec une simple ficelle. Ils content une histoire terrible, faite de tortures et de fuites éperdues, qui prend sa source à Budapest à la fin du XIXe siècle et qui dessinent en filigrane le portrait d’un monstre de papier exceptionnel, effrayant et terriblement authentique. De sa genèse en 1873 à la traque impitoyable qu’il exerce de nos jours, Jakab est le véritable héros de ce roman à la tension omniprésente. Stephen Lloyd Jones réussit à l’exploit de concevoir un méchant comme on en voit rarement, cruel et implacable, et pourtant très humain, en explorant la manière dont Jakab est devenu cet objet de terreur pour toute une famille. Nous découvrons un être qui ploie sous le poids d’une gigantesque frustration, aveuglé par sa haine et son besoin de revanche. Une totale réussite.
Stephen Lloyd Jones alterne les voix et les époques, distillant ses informations au compte-goutte, piquant le lecteur, le ferrant jusqu’au bout. Il utilise le folklore hongrois et les légendes européennes pour construire son personnage, une créature méconnue des lecteurs francophones : le Hosszú élet. L’idée est d’autant bienvenue qu’elle change agréablement des vampires, sorcières, fantômes et autres loup-garous que l’on croise à tour de bras dans les récits fantastiques. On espère sincèrement que Stephen Lloys Jones nous livrera un nouveau roman sur ce peuple mystérieux !
Roman à la tension palpable, au suspense soigneusement construit, L’Ombre est un récit oppressant et fascinant, maîtrisé de bout en bout. Le personnage de Jakab est clairement à mettre au panthéon des grands monstres produits par la littérature moderne. Tout simplement génial !
L’Ombre, Stephen Lloyd Jones. Super 8, janvier 2015. Traduit de l’anglais par Pierre Szczeciner.
Par Emily Vaquié
Je vais bientôt le sortir de ma PAL et connaissant les publications Super 8 je sens que je vais le dévorer !! 🙂 Ta chronique donne vraiment envie de le découvrir 🙂
Hou la la, ça a l’air très très bien ! Ma seule déception chez cet éditeur est « Treize », juste un petit incident de parcours avec moi parce que tout ce que j’ai lu est vraiment bon. « L’innocence » me tente aussi pas mal.
Je conseille vraiment vivement 🙂
Dommage pour Treize, j’avais beaucoup aimé ! L’Innocence, un poil moins…