Le Château : bienvenue chez les Ferrayor

Difficile de ne pas s’arrêter devant le roman d’Edward Carey, Le Château, qui vient de paraître aux éditions Grasset : récit magnifiquement illustré par l’auteur, dans un univers que n’aurait pas renié Tim Burton, Le Château attire le regard sur les étals des libraires.

Premier tome d’une trilogie intitulée « Les Ferrailleurs », Le Château nous plonge dans l’univers étrange et onirique des Ferrayor, une famille qui règne en maître sur une gigantesque décharge, dans un manoir immense fait de bric et de broc. Chaque membre de la famille s’est vu attribuer un objet de la décharge à la naissance, un objet qu’il doit chérir et protéger. Pour le jeune Clod, c’est une bonde universelle qu’il possède depuis sa venue au monde. Notre jeune héros a quinze ans, bientôt seize, et s’apprête à vivre un moment crucial : bientôt, il quittera ses culottes courtes pour un authentique pantalon, symbole du passage à l’âge adulte, et devra épouser sa cousine… ce qu’il redoute tout particulièrement.

Le Château, les Ferrailleurs

Bien en dessous de Clod, sous la maison, vivent les nombreux domestiques de la maison, et parmi eux, une nouvelle recrue : Lucy Pennant. Sceptique et obstinée, la jeune fille découvre un monde à la frange de l’absurde et d’étranges règlements qui semblent spécialement conçus pour effacer la personnalité des serviteurs.

Entre Clod et Lucy, la rencontre va faire des étincelles…

C’est un étrange univers dans lequel le lecteur pénètre : l’immersion dans le roman est d’autant plus facilitée car chaque nouveau début de chapitre est superbement illustré par l’auteur, d’un coup de crayon gothique et somme toute très esthétique. Le lecteur a l’impression de découvrir un microcosme à part, à la limite du fantastique, en noir et blanc. On retrouve un peu de Dickens dans l’univers décrit, un peu de Burton dans l’esthétisme du roman, et même un poil de Lemony Snicket dans la narration toute particulière. Alternant entre Clod et Lucy, le récit permet au lecteur de découvrir deux mondes bien distincts : le monde d’en-haut, où vit la famille Ferrayor, et celui d’en-bas où évoluent les domestiques. Le clivage entre ces deux univers est fascinant à observer. La suffisance des uns rencontre l’abnégation des autres. Mais tant Clod que Lucy ne sont pas à leur place dans ce système parfaitement huilé : Clod se distingue de ses congénères car les objets lui parlent et lui susurrent leur nom. Lucy, elle, remet en cause la perte d’humanité et d’identité des serviteurs, une véritable réification en somme… qui va le devenir littéralement.

Roman inclassable, et franchement chouette, Le Château constitue une introduction efficace et charmante à l’univers littéraire et graphique d’Edward Carey. C’est un bel objet à l’univers bien marqué, que l’on ne peut que vous conseiller de découvrir !

Le Château, Edward Carey. Tome 1 de la « trilogie des Ferrailleurs« . Grasset, 2015. Traduit de l’anglais par Alice Seelow.

Par Emily Vaquié

A propos Emily Costecalde 1154 Articles
Emily est tombée dans le chaudron de la littérature quand elle était toute petite. Travaillant actuellement dans le monde du livre, elle est tout particulièrement férue de littérature américaine.

2 Commentaires

  1. Un univers fantastique, sombre et fascinant qui nous présente deux anti-héros qui se détachent de la norme (si l’on peut parler de normalité dans ce décor si étrange). Mais l’étrangeté est ce qui fait le charme de cette lecture et on se perd facilement et avec délice dans les méandres de la grande décharge de Londres. Une lecture fortement recommandée !

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