2020 – Le top 3 des rédactrices !

La sélection d’Emily :

Ma sélection 2020 est très axée autour des femmes fortes, et deux d’entre eux se passent à New York (les 3 aux Etats-Unis, on ne se refait pas !). Je vous précise que je vais citer mon top 3 par ordre de lecture et non de préférence.

Au bonheur des filles, Elizabeth Gilbert

Au bonheur des filles, j’en ai déjà parlé plus longuement sur le site : j’ai aimé car ça se passe à New York en 1940, juste avant l’engagement de l’Amérique dans le conflit mondial. Une jeune fille en fleur en quête de liberté s’installe chez sa tante dans un vieux théâtre délabré, et va y faire ses expériences, bonnes comme mauvaises. Sacré roman d’apprentissage dans un cadre ô combien passionnant, ce roman historique campe un Manhattan oublié, hors du temps, et je n’ai qu’une envie : en lire davantage à ce sujet ! Si vous avez lu et aimé Broadway Limited, ce roman ne manquera pas de vous parler. C’est par ailleurs un roman qui porte un message résolument féministe !

Au bonheur des filles, Elizabeth Gilbert. Calmann-Lévy, 2020. Traduit de l’anglais par Christine Barbaste.

Avec Park Avenue Summer, on fait un bond dans le temps mais on reste à New York : nous voilà en 1965, à suivre une jeune femme qui rêve de devenir photographe et qui, par le jeu du hasard, va devenir l’assistante de Helen Gurley Brown, la nouvelle rédac’ chef de Cosmopolitan. Autres temps, autres moeurs : dans une ambiance très Mad Men, nous suivons une jeune femme moderne qui cherche à trouver sa place dans un monde encore très masculin. On songe à Rien n’est trop beau, le très bon roman de Rona Jaffe, qui détaillait déjà le destin de femmes cherchant à s’imposer dans le milieu de l’édition new-yorkaise.
C’est un très bon roman, très équilibré entre féminisme, romance et background historique : on dévore les pages, tant c’est bien ficelé.

Park Avenue Summer, Renée ROSEN. Belfond, 2020. Traduit de l’anglais par Valérie BOURGEOIS.

Les 7 ou 8 morts de Stella Fortuna
Les 7 ou 8 morts de Stella Fortuna est probablement LE roman que j’ai préféré cette année : c’est bien simple, il compte à peu près tout ce que j’aime trouver dans un roman. Prêts pour l’énumération ? C’est une saga familiale sur plusieurs décennies : + 10 point. C’est une héroïne forte : + 5 points. C’est un roman sur l’immigration aux States, entre Italie et côte est : + 10 points. Il y a un léger parfum de surnaturel : + 1 point. Il y a une réflexion sur la maternité, sur la féminité, sur le mariage : +3 points.
En somme c’est un premier roman ultra maîtrisé, sur une femme qui naît au début du XXe siècle en Italie, deuxième fille d’un couple qui a perdu son aînée de la grippe espagnole. Stella Fortuna grandit avec un triple fardeau : l’ombre de sa soeur défunte, ce nom (Bonne étoile en gros) comme une provocation au destin, et le fait qu’elle soit née femme dans un minuscule village italien en 1920. Sacré destin que celui de Stella Fortuna, entre grands bonheurs et grandes tragédies… Un très, très grand roman !

Les sept ou huit morts de Stella Fortuna, Juliet Grames. Presses de la cité, octobre 2020. Traduit de l’anglais par Caroline Bouet.

La sélection de Coralie :

Il est des livres qu’on ne chronique pas forcément sur Café Powell : manque de temps, livre lu furtivement, lecture plus personnelle … Les raisons sont multiples. Mais quand il s’agit d’un livre qui est dans notre top 2020, il est impératif de réparer cet oubli !  Et c’est chose faite aujourd’hui pour Je suis fille de rage de Jean-Laurent Del Socorro.

Par où commencer ! Je suis fille de rage est un roman sur la guerre de Sécession, mais qui se vit de l’intérieur. Car l’auteur a compilé de nombreuses sources historiques (traduites pour la plupart par ses soins !) et les a habilement enrobées de fiction et d’une pointe de fantasy, juste quand il fallait. À travers une vaste galerie de personnages, il nous relate les jalons de cette guerre et ses enjeux, sans omettre aucun point de vue. Et il a réussi l’exploit d’être à la fois méticuleux et passionnant !  Autre point qui ne gâche rien ? C’est aussi un récit engagé, qui dénonce avec subtilité l’esclavage et le racisme. Puisqu’on vous dit qu’il a tout bon !

Je suis fille de rage, Jean-Laurent Del Socorro. ActuSF, octobre 2019.

On ne le dit jamais assez, l’important, c’est le partage ! Et ici, ce qu’on s’échange avec plaisir, ce sont les bons conseils. Initialement dans les coups de cœur d’Oihana, ce titre a su se frayer un chemin dans nos piles à lire et conquérir plus de chroniqueuses que prévu !

Âge tendre, c’est avant tout l’histoire de Valentin. Ou plutôt celle de son rapport de serci. Car dans un futur proche, chaque élève doit effectuer un an de service civique entre son année de 3ème et l’entrée en 2nde. Et c’est contre son gré que l’adolescent est envoyé dans un centre pour personnes âgées atteintes d’Alzheimer, situé dans le Pas-de-Calais, conçu pour ressembler à un village des années 1960.
Et vu la morosité ambiante de 2020, quoi de mieux qu’un bond en arrière, direction les années yéyés et ses motifs colorés ? Au gré du rapport de Valentin, on suit donc l’évolution des résidents dont il s’occupe, des gens qui l’entourent, mais surtout on observe avec beaucoup de tendresse son évolution à lui. Car si le titre fleure bon les années 60-70, il évoque aussi cette période si particulière qu’est l’adolescence. Incroyablement juste, drôle et touchant, on pourrait vous parler pendant des heures de cette petite pépite. Alors juste, croyez-nous sur parole et lisez-le !

Âge tendre, Clémentine Beauvais. Sarbacane, août 2020.

Une quarantaine, un environnement hostile, un couvre-feu … ça vous rappelle quelque chose ? Bpocalypse, pardi ! Ariel Holzl nous raconte cette fois-ci le quotidien de Samsara, une jeune fille de 15 ans qui évolue dans un monde post-apocalyptique (ce qui explique pourquoi elle ne se promène jamais sans sa batte de baseball et ses talismans). Sa ville de Concordia vient justement de lever la quarantaine de l’ancien parc public (mais pas le couvre-feu … vous suivez ?) et s’apprête à accueillir ses nouveaux habitants … réputés avoir muté. Et il faut dire que les deux jumeaux qui débarquent dans la classe de Sam et ses amis sont loin de rentrer dans le moule. Leur arrivée coïncide d’ailleurs avec tout un tas d’incidents inexpliqués. Mais est-ce qu’on ne sauterait pas un peu trop facilement aux conclusions ?
Des jeux de mots, un bestiaire qui en jette et une atmosphère de folie ! Ariel Holzl sait une fois de plus comment embarquer son lecteur dans son univers. Une bonne raison de lire ce livre ? Ses punchlines toujours aussi bonnes : “Raphaël gagna le fond de la classe. Beaucoup de filles se retournaient sur son passage, prouvant définitivement aux yeux de Sam que les hormones étaient plus dangereuses que la radioactivité.” Une deuxième raison ? Une histoire soignée, entraînante, qui sait aussi se faire écho de problématiques bien actuelles ! Go, go, go les lecteurs !

Bpocalypse, Ariel Holzl. L’École des loisirs, octobre 2020.

 

La sélection d’Oihana :

Quoi ? On en a déjà parlé ? Mais on ne parle jamais assez de ses coups de cœur ! Et si vous n’aviez pas encore suivi, il est grand temps de s’y mettre !
Récits du Demi-Loup est donc une série de fantasy en quatre tomes signée d’une des meilleures voix de la fantasy française – pas moins. On y suit (pour faire simple) la famille royale du Demi-Loup, empêtrée qu’elle est dans une épidémie meurtrière et un ennemi aux dents longues qui se masse aux frontières. Si on ajoute à cela une petite discorde qui naît puis grandit entre les héritiers au trône, on a tous les ingrédients d’une histoire mouvementée.
La série est dominée par un système narratif original, puisque le récit est entièrement lu dans les journaux intimes d’une partie des protagonistes. Et contrairement à ce que l’on pourrait croire, cela rend le récit extrêmement palpitant et particulièrement addictif ! Alors que l’on pensait avoir toutes les clefs en main, l’autrice bouleverse quelque peu le mode narratif dans le dernier opus, laissant pour la majeure partie du roman les lecteurs sur des charbons ardents. Au fil des quatre tomes, elle nous embarque dans une intrigue complexe et parfaitement mise en place, qui narre la déliquescence d’un royaume un peu terne et qui se prenait pour le centre du monde. Le récit implacable est mené de main de maître, et fait passer les lecteurs par toutes les émotions. Bref : c’est brillant. Donc arrêtez avec cet article, et allez vous procurer le tome 1 si ce n’est toujours pas fait !

Récits du Demi-Loup, Chloé Chevalier. Les Moutons électriques, août 2015 à avril 2020.

Prix Elbakin.net, Prix Vampires & Sorcières… La Dernière Geste a, elle aussi, fait faire à son autrice une entrée remarquée dans la fantasy française !
En cette fin XXe siècle, les Humains traitent les fées et autres créatures magiques dont ils redoutent les pouvoirs comme des animaux dangereux. Si les mentalités n’ont pas vraiment évolué, la politique n’a pas beaucoup bougé non plus : de féroces aristocraties oppriment le peuple et empêchent toute révolte. Dans cet univers riant et ô combien démocratique, nous suivons quelques personnages hauts en couleur parmi lesquels la Capitaine d’une rame de l’Orient-Express qui ne s’en laisse pas conter, un Barde mythique dont l’élève a un triste passé, et une princesse japonaise qui a définitivement beaucoup trop de répartie pour son propre bien…
Le roman s’ouvre sur une succession de scénettes qui ne tardent pas à former un vaste tableau d’ensemble, tout en dessinant finement la psychologie des personnages. Ceux-ci sont assez nombreux, mais l’autrice jongle brillamment avec et ne nous perd jamais !
Côté univers, bien que l’on soit dans un XXe qui fleure bon le steampunk, on a l’impression d’avoir perdu quelques siècles tant la société dominante fait preuve d’étroitesse d’esprit. Heureusement… l’intrigue dessine aussi une certaine évolution des mêmes mentalités – pas pour tout le monde, évidemment, mais tout espoir n’est pas perdu !
Enfin, politiquement parlant, on a droit à une intrigue qui ne fait qu’aller en se corsant. Et si l’autrice n’achève pas le deuxième volume (sorti en septembre) sur un cliffhanger aussi violent que le premier (prévoyez des mouchoirs), elle n’en laisse pas moins les lecteurs sur des charbons ardents. Si vous ne connaissez pas encore la série, profitez-en donc pour rattraper votre retard (la suite arrive fin 2021) !

La Dernière Geste, tome 1 : Dans l’ombre de Paris, Morgan of Glencoe. Actusf (Naos), septembre 2019.

Et voilà, un autre de ces fameux coups de cœur jamais chroniqué, précieusement gardé pour soi-même. Il est temps de réparer cette injustice.
Coyote Sunrise a 12 ans, toutes ses dents, un chat, un papa qui s’appelle Rodeo, et elle vit avec les deux à bord d’un ancien bus scolaire (vous savez, les jaunes que l’on voit dans toutes les séries américaines ? Eux-mêmes). A bord de Yagger (c’est son petit nom), tous trois sillonnent les États-Unis au gré de leurs envies, prenant de temps à autres des auto-stoppeurs et se laissant guider uniquement par l’air du temps. Sauf que, voilà. Coyote apprend un beau matin que le square chéri de son enfance va être rasé pour des besoins d’urbanisme. Elle ne peut absolument pas laisser faire cela. La voilà confrontée à deux problèmes : réussir à faire faire la route à son père en moins de quatre jours alors qu’ils sont à l’autre bout du pays. Le faire à l’insu de celui-ci, puisqu’il a juré ses grands dieux que jamais, au grand jamais, il ne reviendrait au point de départ !
Certains romans sont de petits bijoux, et en voilà un ! Dan Gemeinhart nous embarque dans un road-trip palpitant, aux côtés d’une famille vraiment pas comme les autres. Évidemment, on s’angoisse, on se questionne : Coyote parviendra-t-elle à ses fins ? Pour quelle excellente raison Rodeo éprouve-t-il de l’urticaire lorsqu’on parle de leur ville d’origine ?
Soyons honnête, la raison de cette fuite en avant ne surprendra sans doute pas les plus sagaces d’entre vous. Mais l’auteur nous amène tout en douceur à la révélation, au fil des grandes étapes d’un voyage aussi bien physique qu’émotionnel. Car oui, émotions il y a bien et, si l’on rit beaucoup aux côtés des personnages, il est aussi possible que l’on ait besoin de temps en temps d’un petit mouchoir ! Les péripéties, rocambolesques mais parfaitement agencées, font de ce roman un véritable page-turner, que l’on relira avec grand plaisir.

L’incroyable voyage de Coyote Sunrise, Dan Gemeinhart. Traduit de l’anglais par Catherine Nabokov. PKJ, mars 2020. 

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