Là où règnent les baleines : aventure et ode aux fonds marins

FANTASTIQUE JEUNESSE — Il est des livres qui vous happent dès la couverture ! Et c’est le cas du dernier roman de Jolan C. Bertrand, qui attire de suite l’œil avec ses couleurs pastels et sa couverture à l’aquarelle. Et ça annonce un univers pour le moins riche et original !

Après une année scolaire plus que moyenne, Roanne est envoyée par sa mère pour passer l’été dans un phare en ruines, chez son oncle Kierzic qu’elle ne connaît même pas, histoire qu’elle réfléchisse à ses priorités ! Cet homme aussi grincheux que mystérieux vit en solitaire sur un îlot planté au large de la côte Atlantique, avec pour toute compagnie une mouette rieuse et les rumeurs de l’océan. Voilà un décor qui annonce les vacances de la loose, loin de la civilisation et de toute connexion internet. Dès son arrivée, Roanne est déterminée à s’en aller au plus vite de ce tas de cailloux désert. D’autant plus que, dans la bourgade du coin, on raconte que des naufrages auraient lieu les soirs de pleine lune. Au même moment, un bateau de pêche est porté disparu. Et d’où vient cette voix d’enfant qui l’appelle chaque nuit ? Plus le temps passe, plus les évènements s’enchaînent et plus Roanne se demande si Kierzic ne serait pas un vampire-loup-garou-naufrageur …

Ce qui est incroyable avec ce roman, c’est que le ton est juste, dès le début. Il ne faut même pas un chapitre pour savoir que ça va être un coup de cœur. La narration à la 3ème personne donne accès aux pensées de l’adolescente, qui n’est pas en reste côté humour. Le chapitre 1 s’ouvre ainsi sur des commentaires façon drama queen hilarants de l’héroïne, qui nous présente ses (més)aventures à la façon d’une bande-annonce de cinéma. Roanne est du genre nature peinture et n’a heureusement pas la langue dans sa poche. Après tout, il faut au moins cela pour affronter les affres de l’adolescence. Car la jeune fille, même si elle tend à minimiser la situation, a eu à gérer son quota de harcèlement et de discrimination au sein de son club de natation synchronisée. D’une part par rapport à son corps, et d’autre part à cause de son absence de compétitivité. Car Roanne pratique la natation synchronisée pour la beauté de la chose et danser sous l’eau, comme elle le dit, et pas pour gagner à tout prix comme certaines de ses camarades qui lui font bien sentir. On sent que le sujet est difficile et n’est pas pris à la légère même si ce dernier ne vient jamais plomber l’ambiance. Mine de rien, l’auteur saupoudre aussi avec délicatesse ses convictions au fur et à mesure des pages, que cela soit sur ses valeurs d’inclusion ou sur sa sensibilité écologique.

Impossible, dans cette chronique, de ne pas mentionner la beauté des illustrations d’Hélène Let, qui subliment le récit. Illustratrice et biologiste de formation, elle a su retranscrire à merveille le carnet de notes de Kierzic décrit dans le texte, en y dessinant des créatures et des lieux tous plus magnifiques les uns que les autres. Nous ne vous divulgâcherons pas le plaisir d’aller découvrir lesquels par vous-mêmes ! En plus de ces pages situées au milieu du récit, elle nous propose une couverture incroyable : on y devine Roanne, peinte en aquarelle, qui nage avec une baleine, tirée de l’une très jolie scène de l’histoire. Les couleurs sont magnifiques et rendent bien hommage à la magie océane. Sur les bords de la couverture, un cadre ouvragé et argenté (au fer à dorer) qui n’est pas sans rappeler Les Sœurs hiver, du même auteur. Alors, clin d’œil ou coïncidence heureuse ?

Là où règnent les baleines est donc un coup de cœur : tendre, drôle, palpitant, il a tout bon ! Jolan C. Bertrand est définitivement un auteur à suivre : après nous avoir fait frissonner de plaisir avec Les Soeurs hiver, le voilà qui récidive de la plus belle des façons dans les fonds marins, avec juste ce qu’il faut d’humour, de tendresse et de poésie. Bravo l’artiste !

Là où règnent les baleines, de Jolan C. Bertrand. L’École des loisirs, février 2023.

Par Coralie.

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