Les aventures d’Huckleberry Finn, Mark Twain

Si l’on en croit Ernest Hemingway, « Huckleberry Finn » serait le fondement de la littérature américaine moderne. Une raison de plus, donc, de découvrir une oeuvre phare de la culture du « sud » des Etats-Unis.

Huckleberry Finn, dit Huck, est connu pour être l’ami du célèbre Tom Sawyer, et cette fois, c’est à son tour d’être sur le devant de la scène. Le jeune garçon vit chez une veuve qui tente de le civiliser, en l’envoyant à l’école et à l’église. Mais lorsque le père de l’adolescent l’enlève et le séquestre dans une cabane au bord du fleuve, le jeune Huck décide de fuir, sans vraiment savoir de qui de la veuve, ou de son ivrogne de père, il cherche le plus à échapper. Son chemin croise celui de Jim, un esclave en fuite.

A la fois roman d’apprentissage au fil de l’eau, et roman du « sud », « Huckleberry Finn » se veut un récit oral, réaliste, un exemple typique de ce que les russes appellent « skaz », c’est-à-dire la voix d’un adolescent, avec ses fautes de grammaire, son orthographe parfois approximative, son argot. Oui, car Huck s’exprime comme si le lecteur se trouvait en face de lui, avec la candeur et l’honnêteté d’un enfant. Mark Twain retranscrit l’oralité des dialogues, en écrivant quasiment phonétiquement ce que disent les personnages, surtout Jim, ce qui est assez déconcertant, mais l’on finit par s’y habituer. Lu en anglais, le texte gagne en authenticité : l’on découvre la voix du sud des Etats-Unis, c’est un accent qui se devine à travers les mots. Un Sud encore esclavagiste, où l’une des insultes qui vient spontanément à Huck est « abolitionniste ! »; et où l’esclavage est tellement ancré dans les moeurs que Huck se demande s’il n’est pas moralement tenu de dénoncer son ami Jim.

Au fil de l’eau, Huck découvre l’amitié auprès de Jim, apprend à se montrer aussi astucieux que son ami Tom Sawyer, vit des aventures étonnantes, rencontre des gens étonnants, comme le Duc et le Dauphin, se prenant respectivement pour le duc de Bilgewater et Louis XVII, échappé de sa geôle française. Le lecteur français lira ces passages avec étonnamment : Jim s’étonne notamment que les français ne parlent pas comme lui « Ne peuvent-ils pas parler comme des hommes? » demande-t-il. L’histoire anglaise sera également secouée : l’on découvre un Henry VIII tuant une de ses épouses chaque jour, et responsable de la Boston Tea Party. Inutile de le dire, c’est assez drôle.  Malheureusement, si la première partie du roman a l’attrait et la fraîcheur de la nouveauté, et si l’on fait connaissance avec plaisir au malicieux Huck, la deuxième s’essouffle, et je me suis surprise à survoler certains passages.

Finalement, le point de vue d’Hemingway se vérifie : il est évident que Mark Twain a grandement influencé ses compatriotes. N’y a-t-il pas en effet un quelque chose de Huck dans le récit d’Holden, le héros de Salinger, dans ce récit adolescent, terriblement spontané? Une lecture intéressante, mais pourtant, malheureusement pas un coup de coeur.

A propos Emily Costecalde 1154 Articles
Emily est tombée dans le chaudron de la littérature quand elle était toute petite. Travaillant actuellement dans le monde du livre, elle est tout particulièrement férue de littérature américaine.

11 Commentaires

  1. Je connais le problème, j’aime bien lire des classiques anglais et américains, mais c’est rarement des coups de coeur, parce que je n’entre pas réellement dedans, probablement parce qu’il est
    difficile de s’identifier aux personnages, je ne sais pas. Toujours est-il que c’est toujours sympa à lire, même s’il faut parfois sauter des pages !

    Chouette critique en tout cas !

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