Après Plisse les yeux (2003) et Un conte d’été polonais (2007), le réalisateur Andrzej Jakimowski s’attelle à la difficile tâche de nous faire pénétrer dans un monde de l’invisible: celui où l’on ressent plus que l’on ne voit.
Un soleil de plomb, un ciel sans nuages…un paysage idyllique sur les hauteurs de Lisbonne que les pensionnaires ne peuvent pourtant pas admirer. Ian, jeune professeur anglais lui même aveugle, fait une entrée détonante dans un centre spécialisé pour enfants malvoyants. Qui dit nouveau professeur dit nouvelles méthodes: « les personnes non-voyantes n’ont pas besoin de canne. A moins d’être boiteux ». Un point de vue qui va de moins en moins se conformer aux attentes du directeur de l’établissement, bien inquiet de l’hardiesse de ce nouvel arrivant.
Le non-conformisme n’aura de cesse d’être le leitmotiv du personnage interprété par Edward Hogg (que l’on a vu dans la série Misfits). Ce qu’il veut, c’est délivrer les enfants de ce carcan qui les emprisonnent, ne plus simplement les réduire à leur handicap. Quelle est donc sa botte secrète? Les talons des chaussures justement ou bien la cadence des pas des passants, autant d’indices qui lui permettent de se frayer un chemin dans la rue et d’éviter les obstacles.« Imagine le et tu l’entendras ».Très vite, ses exercices d’application séduisent une autre pensionnaire: Eva, jeune trentenaire mystérieuse qui restait jusqu’alors recluse dans sa chambre.
S’il fait rêver les enfants grâce à ses démonstrations d’écholocation en claquant sa langue ou ses doigts, il joue aussi son rôle d’éducateur avec elle et lui ré-apprend à vivre. Eva regagne sa liberté, celle d’être une femme comme les autres derrière ses lunettes noires.
Sélectionné au festival officiel de Toronto de 2012, Imagine délivre une expérience sur les perceptions dont on sort riche d’une nouvelle vision sur le monde. Si Saint-Thomas ne croit que ce qu’il voit, Imagine nous pousse à nous demander, dans ce qui se joue par notre regard, quel est le faux du vrai?
En salles depuis le 23 octobre.
Capucine Michelet
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