Erin Kelly est une journaliste londonienne qui, avec Un feu dans la nuit, signe son troisième roman, et s’affirme comme une reine du thriller psychologique. Après les très remarqués thrillers qu’étaient L’Arbre au poison et Broadchurch, elle revient avec un thriller psychologique glaçant, mêlant machinations et secrets de famille.
Chez les MacBride, on vit comme un clan, depuis toujours. Depuis des années, toute la famille se retrouve pour les vacances et la Fête des tonneaux dans la grange aménagée de Far Barn. Mais cette année, tout a changé ; Lydia, la matriarche, est brutalement décédée d’un cancer qu’elle avait caché à tous. Rowan, le patriarche, ne sait plus trop où il en est. Du côté des enfants, ce n’est guère mieux. Tara suit encore un nouveau régime alimentaire que son adolescent de fils respecte à contrecœur, et contourne avec l’aide complice de Matt, le nouveau petit ami de sa mère. Sophie, qui vient d’accoucher de son quatrième enfant, une petite fille, est en froid avec Will, son mari, qui l’a trompée. Finalement, il n’y a guère que Felix qui semble remonter la pente. Pour la première fois, Felix vient à Far Barn avec une petite amie, la sublime et très silencieuse Kerry.
À Far Barn, tout le monde essaie de faire bonne figure ; les hommes investissent la cuisine, les sœurs tentent d’ignorer le léger et récent penchant pour la boisson de leur père, les enfants feignent de ne pas remarquer les tensions entre leurs parents. Heureusement, la fête des Tonneaux s’annonce aussi sensationnelle qu’à l’accoutumée. L’idéal serait que Sophie participe à la fête, histoire de changer de son train-train de super-maman ; mais elle ne peut pas laisser Edie, qui n’a que neuf mois, seule à la maison, ou priver quelqu’un d’autre de la fête. À moins que Kerry, la très serviable petite amie de Felix, qui n’aime pas la foule, ne garde la petite. C’est donc décidé, Edie a une baby-sitter, chacun ayant avancé les bons arguments pour faire céder Sophie ! Et la soirée se passe à merveille pour tout le monde. Du moins jusqu’à ce que l’on rentre à la maison… car, au retour, Sophie – rentrée plus tôt avec son plus jeune fils – trouve la maison vide. Bien vite, il faut se faire à l’évidence : Kerry a enlevé Edie… et a disparu dans la nature. Les MacBride ont peut-être fait entrer le loup dans la bergerie…
Un feu dans la nuit commence comme un thriller classique impliquant un kidnapping incompréhensible. Mais l’auteur se démarque rapidement du schéma habituel ; on suit, tour à tour, quatre personnages, dont le premier est Sophie, la fille aînée de Rowan et Lydia, celle qui prend les choses en main, et dont l’enfant disparaît. Elle nous permet de situer les MacBride et, surtout, on assiste à son désarroi et à sa panique lorsqu’elle comprend ce qui est arrivé. La tension, en quelques chapitres, est à son comble. Mais plutôt que de poursuivre dans cette veine, avec les inévitables recherches immédiates pour retrouver la petite, l’auteur nous plonge dans un long retour en arrière.
C’est là que l’on rencontre le second personnage, dont on ne comprends pas bien, initialement, qui il est. Mais l’histoire est narrée de telle façon que l’on met le kidnapping dans un coin de sa tête, et qu’on s’intéresse au jeune homme, dont la route ne tarde pas à croiser celle des MacBride, quinze ans avant qu’Edie ne disparaisse. Sophie, Tara et Felix, ne sont encore que des enfants, Rowan est directeur d’école, Lydia magistrate. Tour à tour on prend en pitié notre nouveau personnage, on s’insurge, on le déteste. Erin Kelly croque ses personnages avec beaucoup de brio, montrant leurs différentes facettes tour à tour, ce qui les rend attachants, avant de ternir un peu leur image. Chaque personnage a des choses à se reprocher, des petits secrets qu’il garde scellés, mais également des élans de bonté qu’on ne peut ignorer.
Erin Kelly construit son intrigue par strates successives : il y a l’enlèvement d’Edie, bien sûr, qui occupe le premier plan. Mais il y a aussi ce que vit notre second personnage – et dont finira par découler cet enlèvement – et la façon dont l’histoire se mêle à celle des MacBride. Enfin, il y a le journal de Lydia, par l’entremise duquel on sait qu’elle a commis un acte impardonnable, alors que tout le monde la voit comme une personne exemplaire, sans savoir avant les dernières pages de quoi il est question au juste.
Et le système fonctionne diablement. Car, au fur et à mesure que l’on découvre le passé des MacBride, on réfléchit aux raisons et conséquences de l’enlèvement d’Edie dans le présent, tentant de deviner comment s’organise la machination ô combien complexe qui se cache derrière. Le suspense est, d’un bout à l’autre, très présent, et il est difficile de lâcher ce roman particulièrement prenant. On est, finalement, presque déçus d’arriver à la fin, tant on a été tenu en haleine tout au long du récit !
Un feu dans la nuit, sous des dehors très classiques, est donc un thriller psychologique remarquablement bien construit, ambitieux, prenant à souhait, et qu’on lit d’une traite, tant le suspens est prenant. Voilà qui confirme le talent d’Erin Kelly pour les intrigues complexes et bien menées !
J’ai adoré ce roman ! Le suspens est vraiment insoutenable, on le lit d’une traite 🙂