Monsieur Mozart se réveille… Il y a toujours un côté un peu jouissif à imaginer un personnage de l’Histoire se réveiller de nos jours et découvrir, perplexe, l’effervescence du XXIe siècle. Le procédé a déjà été exploré dans Il est de retour, qui imagine le réveil d’Hitler. Eva Baronsky, elle, met en scène Mozart, un héros bien évidemment mille fois plus sympathique.
Notre ami Mozart se réveille en 2006 dans un lit inconnu : hier encore, il agonisait sur son lit de mort, en 1791. Le voilà en pleine forme… mais dans le Vienne du XXIe siècle. Tout semble étrange à ses yeux : les voitures, les téléphones, la lumière électrique… Il faut tout lui expliquer, ce qui lui donne bientôt l’air d’un charmant illuminé auprès des personnes qu’il va rencontrer. Il découvre la modernité avec l’enthousiasme, l’insouciance et la candeur d’un enfant. Le regard qu’il porte sur la musique est véritablement réjouissant, il s’intéresse à tout, et particulièrement à ce qui n’existait pas à son époque. Il apprend avec plaisir que son nom a traversé les siècles… mais il se rend également compte qu’il a laissé l’oeuvre de sa vie inachevée. Diantre, c’est un de ses disciples qui a terminé le Requiem ! Et si Mozart n’était revenu que pour achever son chef d’oeuvre ? Et si c’était une mission divine ?
Les situations absurdes se multiplient pour notre plus grand plaisir : devenu musicien de bar, admiré pour son talent dans les volutes d’un club de jazz, Mozart tente de percer dans la musique… mais on lui reproche de trop donner dans le Mozart ! Délicieux paradoxe… car Mozart ne peut bien évidemment pas avouer sa réelle identité.
On se régale de bout en bout avec ce roman très drôle, aux côtés de ce joyeux inadapté qui porte sur le monde un regard très frais. Le tout est bien évidemment bercé par la musique, qui semble presque traverser la page pour atteindre nos oreilles ! Mozart se révèle dans ses pages sympathique et touchant. S’il est d’un optimisme presque à toute épreuve, il traverse bien-sûr quelques phases de doute et de désespoir bien compréhensives, comme lorsqu’il se laisse tomber à genoux devant ce qui, hier encore, était son foyer… Éternel déraciné, Mozart doit faire le deuil de sa vie passée, et au-delà, de tout un monde désormais révolu. Adieu, XVIIIe siècle, adieu monde connu ! Bienvenue à Vienne, ville cosmopolite, résolument moderne, où règne toujours la musique, une constante bienvenue pour notre héros. Mais Vienne n’est plus la capitale d’un Empire, tant de choses ont changé…
On laisse Monsieur Mozart se réveille avec la sensation déconcertante de quitter un ami. Plusieurs en réalité, car d’autres personnages solaires traversent le récit, comme Piotr, le violoniste polonais à la sagesse pragmatique, ou encore la douce Anju…
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