RENTRÉE LITTÉRAIRE — Les éditions Stock nous livrent un roman véritablement étonnant en cette rentrée littéraire : Les Talons Rouges est à la fois un roman historique de très bonne facture, et un roman de vampires très littéraire. On vous en dit un peu plus sur ce roman à découvrir fin août en librairie.
Les Talons rouges suit une famille noble, les Villemort, dans les tourments de la Révolution française. La famille est étendue, riche en neveux et nièces, cousins et cousines, et se réunit autour d’Henry de Villemort, le patriarche, le premier à être devenu un vampire. Né au XVIe siècle, il continue à assurer la fonction de chef de famille à la fin de l’ancien régime. Nous suivons l’évolution de ce clan du début des bouleversements jusqu’à la fin de la Terreur, le récit s’attachant tout particulièrement à décrire le parcours de Louis et de William, deux membres charismatiques et investis en politique de la famille.
On aime car c’est un roman historique très documenté, qui nous décrit avec précision une des périodes les plus célèbres et pourtant paradoxalement une des plus méconnues de notre histoire : la Révolution française. Le récit foisonne de détails historiques, et on y croise certaines des personnalités les plus emblématiques de l’époque, comme Danton, Robespierre, Louis XVI… C’est certes foisonnant, mais ce n’est jamais lourd. En un mot, c’est toujours passionnant, et le récit montre que cette période que les cours d’histoire portent aux nues, était aussi une ère extrêmement violente, aux actions très contestables.
Quelle meilleure période que la Révolution française pour une histoire de vampires ? Antoine de Baecque nous propose ici une nouvelle vision du mythe du vampire, le vampire en famille ! On est bien sûr plus proche de Lestat de Lioncourt (lui-même un aristocrate français) que d’Edward Cullen (l’éternel lycéen américain). Ce clan noble, les Villemort, est en effet immortel et sanguinaire mais comme la plupart des familles nobles, il sera mis à mal par les événements de la fin du XVIIIe siècle. On les pensait puissants, intouchables, mais la foule en colère peut les renverser. Le triste destin de la matriarche, Ewa, est une métaphore à peine masquée du destin de la noblesse qui se croyait jusqu’à la Révolution protégée des ires du peuple… Ces vampires sont bien sûr décadents, ivres de plaisir : leurs moeurs sont parfois dégénérées (Louis Villemort n’est-il pas le fruit d’un inceste entre des jumeaux ?)… Lestat y aurait trouvé là de bien sympathiques compagnons de jeu !
On aime donc la manière dont l’auteur lie ces deux aspects, la fresque historique à la fois factuelle et effroyable, et l’existence de ces vampires qui survivent à la marche des siècles avec un spleen indéniable… Même s’ils sont immortels, nos amis vampires sont rattrapés par le temps qui passe, les jeunes générations aspirent à autres choses, le patriarche perd peu à peu prise sur sa longue lignée… Le tout est décrit avec un style très littéraire, très agréable à lire… Bien joué !
Les Talons rouges, Antoine de Baecque. Stock, août 2017.
Si on est plus proche d’Anne Rice que de Meyer, je signe ! Du reste, un roman de vampire dans une collection de littérature générale, j’avoue que ça m’intrigue…