FANTASY JEUNESSE — Nathalie Somers a plusieurs casquettes à son actif : en plus d’enseigner, elle a écrit un tas de chouettes romans, contes et autres albums pour la jeunesse. Et on parle aujourd’hui de son dernier titre en date, Roslend, qui nous embarque dans un univers haut en couleurs.
Lucan vit à Londres où, sous la houlette de son grand-père, il apprend – à contrecœur – les secrets du métier d’horloger. En réalité, Lucan ne rêve que de deux choses : jouer au hurling, un sport bien implanté dans la communauté irlandaise, et s’engager dans la Royal Air Force. Car nous sommes à Londres, certes, mais en 1940. Or, si les vœux les plus chers de Lucan ne sont pas exaucés – ou du moins pas comme il l’espérait – lui et son amie Catriona vont rapidement se retrouver embringués au cœur d’une aventure nettement plus palpitante qu’un match un peu serré de hurling.
Lucan met en effet la main sur une bien étrange horloge dans l’atelier de son grand-père, laquelle l’expédie en plein cœur d’un univers parallèle et plein de fantaisie : Roslend.
Malheureusement, les couleurs chatoyantes de la faune et de la flore, les us et coutumes raffinés de la société roslendienne, dissimulent mal ce qui ronge le pays : la guerre contre Nelbri, qui est à deux doigts de mettre les Roslendiens à genoux. Il leur faut absolument mettre la main sur la machine de cryptage de l’ennemi afin d’intercepter leurs messages, s’ils veulent avoir un espoir de gagner cette guerre. Pendant ce temps-là, à Londres, Churchill aimerait bien mettre la main sur Enigma, qui lui simplifierait grandement la vie. Et pour cela, il suffit peut-être bien de débloquer la situation à Roslend… de préférence avant que les Allemands n’aient rasé la cité britannique !
Il ne faut guère plus de quelques chapitres à Nathalie Somers pour nous plonger dans un univers extrêmement original : pas à pas, Lucan découvre des coutumes, une organisation sociale, un microcosme qui lui sont tout sauf familiers. Le dépaysement est total et efficace : on s’émerveille devant les animaux rencontrés, les techniques employées, ou à la pensée de l’architecture. Et ce qui est assez amusant, c’est qu’il est loin de découvrir tout cela en passant par la grande porte : quel que soit le lieu où il atterrit dans cet univers parallèle, le jeune garçon finit immanquablement par en visiter… les cachots. Et c’est pourtant pas faute d’y mettre de la bonne volonté, souvent mal perçue par les autochtones ! Mais cela change agréablement des romans où le protagoniste apporte son aide volontaire et est reçu comme le Messie.
Volontaire, Lucan l’est : s’il n’a pas pu réaliser son rêve d’entrer à la RAF pour sauver son pays, il le tirera des griffes d’Hitler par un autre moyen.
L’auteure a parfaitement intégré le contexte historique des bombardements londoniens à sa fantasy: comme on fait de nombreux allers-retours entre les deux univers, on vit à la fois la bataille d’Angleterre et celle pour Roslend, les épisodes des deux guerres ayant tendance à se superposer. Difficile, donc, de s’arrêter entre deux chapitres, d’autant que l’histoire n’est pas convenue. On pourrait craindre que connaître l’issue de la bataille d’Angleterre gâche l’intrigue du roman : eh bien pas du tout ! Nathalie Somers parvient à nous plonger dans l’urgence de la situation, à nous faire angoisser et à nous faire ressentir la détresse dans laquelle se trouvent les assiégés. L’ambiance est tout simplement bluffante ! D’ailleurs, la fin semble arriver bien trop vite : on aurait volontiers embrayé immédiatement sur le tome 2 !
Outre l’ambiance survoltée et le rythme palpitant, les personnages font partie du charme du roman. L’histoire est, bien évidemment, centrée sur Lucan, puisqu’il a le don de voyager entre Londres et Roslend. D’ailleurs, son ascendance cache quelque secret dont on a hâte de connaître tous les arcanes (et même si celui-ci est déjà quelque peu débroussaillé). Mais Lucan ne serait rien sans Catriona. Sa flamboyante amie lui sert à la fois de coach de hurling, d’aide précieuse, de confidente et de frangine. Le duo, quoique assez souvent séparé au cours de l’intrigue, se montre aussi attachant que débrouillard – et ce n’est pas peu dire.
Avec La Bataille d’Angleterre, Nathalie Somers ouvre son diptyque Roslend de bien belle façon : l’intrigue est prenante, l’univers hautement original et le tout relevé par un duo que l’on quitte à regrets. Autant de raisons d’avoir d’ores et déjà envie de se jeter sur le tome 2 !
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