FANTASY — Ce roman choral s’ouvre à Marseille, le 16 février 1596, pendant les guerres de Religion. Entre république catholique et royauté protestante, la cité phocéenne s’insurge et cherche à s’émanciper. L’Histoire avec un grand H sert alors de trame et met en lumière le destin des 4 personnages principaux de ce roman. Une ancienne mercenaire qui essaie tant bien que mal de brider sa nature et de devenir une respectable aubergiste ; un chevalier fatigué, usé par la vie qui cherche une dernière fois à faire le bon choix ; une vieille femme intronisée trop jeune parmi les savonniers de Marseille et désormais à la tête de la Guilde des assassins ; des magiciens amoureux, transis d’amour, de magie et de désespoir. Les passés et les futurs s’entremêlent : ils tissent des liens. Les personnages secondaires ne sont pas en reste et intriguent également : avec une mention spéciale pour Gabin (« Gamin, sans aime », que l’on découvre un peu plus au travers de la nouvelle présente à la fin du roman) et Silas, qui, au contraire des autres protagonistes, s’adresse directement au lecteur et permet habilement de resituer le contexte historique.
L’action du roman se déroule rapidement, en moins de 24h. Cette journée charnière est dépeinte dans les première et troisième parties, qui correspondent respectivement à la rencontre des protagonistes et à la résolution de leurs destins entremêlés. La deuxième partie est quant à elle centrée sur des flashbacks et nous permet de revenir sur le passé des personnages afin de mieux comprendre leurs motivations. Les chapitres sont courts, percutants et dynamiques.
La diversité des personnages offre à l’auteur une pluralité de styles et de problématiques. Chacun cherche à fuir son propre passé, ses propres démons mais tous ont encore en main leur destin. Les points de vue se confrontent donc avec justesse, et nous permettent à l’occasion de revivre une même scène, à travers des regards différents. Les thématiques abordées dans ce roman sont, à l’image des personnages, fortes et variées. On explore tour à tour leurs colères : culpabilité, addiction, foi, identité ou encore maternité. On notera également les références au tarot de Marseille qui ont été parsemées dans le récit : que ce soit dans les titres de chacune des trois parties du roman qui évoquent le tirage des cartes, par les personnages qui rappellent certaines des arcanes ou encore par certaines allusions du texte (comme le nom de l’auberge par exemple, la Roue de la Fortune). Qu’on se le dise, le fil rouge de ce roman est donc la destinée.
En conclusion, un premier roman magistral qui joue avec les genres : la fantasy, subtilement intégrée au récit, délicatement ancrée dans le réel, et l’uchronie.
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