LITTÉRATURE — Deux époques, deux parcours très différents mais une même ville : New York. Quelle autre mégalopole aurait pu faire l’affaire pour ces deux romans qui parlent tous deux du microcosme de la presse ? Aucune. C’est bien ce qui fait son charme.
Année 1965 : Alice est une jeune provinciale qui débarque à Manhattan et rêve de devenir photographe. Grâce à une amie de sa défunte mère, elle devient la secrétaire d’Helen Gurley Brown qui vient de reprendre les rênes du célèbre magasine Cosmopolitan. Alors à la croisée des chemins, le magasine doit trouver une nouvelle identité. Sa nouvelle rédactrice en chef veut en faire, d’un magasine pour les ménagères, la revue des jeunes femmes modernes et affranchies.
Années 2010 : Lucas est lui aussi venu tout droit de sa province profonde et il rêve d’être journaliste. Pour l’instant il se satisfait d’un poste de fact-checkeur à Empire. Sa vie bascule le jour où il couche avec la journaliste sexo Carmen Kelly, qui le tourne en dérision dans sa rubrique. Il prend alors son clavier pour lui répondre et se lance alors dans un duel de plumes, sous l’œil amusé de très nombreux internautes.
Pas du tout la même ambiance, ni les mêmes enjeux dans ces deux romans, et pourtant, Alice et Lucas ont de prime abord de nombreux points communs : ils sont tous les deux des nouveaux-venus à New York et totalement sous le charme de la ville, pourtant parfois terriblement hostile. Tous les deux vont nous faire pénétrer dans l’intimité de la rédaction de deux monuments de la presse américaine.
Ainsi, c’est un Cosmopolitan moribond et en voie de reconstruction que Park Avenue Summer nous dévoile. À cette époque charnière qu’étaient les années 60, entre conformisme et libération des femmes, le travail d’Alice pour Cosmo a tout du récit d’initiation et sa nouvelle patronne a tout du mentir. À ses côtés, Alice osera s’affirmer… et le magasine prendra lui un nouveau départ.
Dans Mr Nice Guy, Lucas aussi est un jeune candide qui apprendra la vie à la dure au sein d’une rédaction. Comme Alice, d’ailleurs, il fuit une rupture. Chez Empire, il apprendra la duplicité et la mesquinerie… ainsi que les ficelle du buzz. Que les temps ont bien changé depuis le Cosmo de 1965, qui choquait avec une jeune femme décolletée en une ! Chez Empire, Lucas et Carmen racontent en détails l’initiation sexuelle du jeune homme. Les lecteurs facilement effarouchés feraient mieux de s’abstenir !
Les autres passeront indéniablement un bon moment à suivre Lucas et à le voir s’embourber dans une situation rapidement intenable. On a bien envie de le voir triompher, même s’il mériterait quelques bonnes claques. Cependant, les années 2010 n’ont pas le charme des sixties dans lesquelles nous plonge Park Avenue Summer : les clopes qu’on fume à tout va, le cliquetis des machines à écrire, les martinis pris dans des petits bars de Manhattan et les célébrités de l’époque que l’on croise au détour d’une page… Indéniablement, le parcours d’Alice séduit, d’autant que s’y ajoute juste ce qu’il faut de romance et d’introspection. Si Mr Nice Guy rappelle peut-être un peu Sex and the City, Park Avenue Summer évoque lui Rien n’est trop beau de Rona Jaffe ou la série Mad Men.
Dans les deux cas, New York tient le beau rôle : même si le privilège d’y vivre et de s’y établir est durement acquis, nos personnages trouveront la force de s’y épanouir, malgré les loyers élevés, la compétition et les écueils amoureux. Bonne pioche dans les deux cas !
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