LITTÉRATURE JEUNESSE — Clémentine Beauvais fait partie des autrices jeunesse que l’on pourrait recommander encore et encore, à chaque titre – mais que, curieusement, nous avons très peu chroniquée sur Café Powell.
Il est temps de rattraper cette injustice, et son dernier titre en date, Âge tendre, remplira cet office !
France, dans un futur (très) proche (quoiqu’indéterminé). Valentin, comme tous les élèves de troisième, doit effectuer son service civique obligatoire (plus connu sous le nom de serci) : un an de stage dans un environnement professionnel, hors de sa région d’origine. Valentin, perclus d’angoisses et de phobies, a posé des vœux clairs : il souhaite travailler dans un lieu calme, dépourvu de personnalités non conventionnelles (idéalement : une bibliothèque), dans une région comme le Limousin. Malheureusement pour lui, il obtient Boulogne dans le Nord-Pas-de-Calais, et se retrouve affecté dans un EHPAD spécialisé dans le suivi de patients atteints d’Alzheimer. Or, ce n’est pas n’importe quel EHPAD. Il s’agit d’une Unité Mnémosyne, qui s’attache à recréer l’environnement de la période dans laquelle sont bloqués les patients. Pour Valentin, ce seront donc les années 1960-1970. Première mission : rédiger les réponses d’un concours du magazine Salut les copains auquel ont participé les résidents, et dont le premier prix était un concert privé de Françoise Hardy. Dont Valentin affirme, dans un élan d’enthousiasme, qu’elle viendra bien. Problème : Alzheimer est ainsi fait que certains souvenirs refusent de s’effacer…
Dès les premières pages, la nature de ce qu’on lit est claire : il s’agit du rapport de stage de serci que Valentin doit rendre à l’issue de celui-ci. Nombre de pages attendu : une trentaine. Nombre de pages réel : 378. “Oups, j’ai dépassé”, écrit le jeune homme dès son introduction, ce qui donne le ton du roman !
Au fil des chapitres, on découvre donc le journal de bord du jeune garçon, écrit dans le style attendu d’un rapport de stage de troisième : c’est un peu guindé (pour faire comme dans les guides qu’il a lus), un peu maladroit, en somme pas très littéraire. Mais c’est justement ce qui fait partie de son charme, ça et les remarques souvent très drôles qui parsèment le texte. Car le jeune garçon, juste avant le rendu final, a ajouté des “Notes rétrospectives” qui viennent nuancer son propos, ajouter des explications, voire se moquer gentiment de lui-même, au regard de l’évolution qu’il a connue.
Car il est indéniable que ce journal montre parfaitement comment l’année de stage a transformé Valentin. Il arrive dans les Hauts-de-France à contrecœur, traînant une situation familiale difficile à vivre pour lui, hyper anxieux, et, soyons honnête, assez immature. Et bizarrement, le contact des personnes âgées de l’unité va grandement l’aider.
A leurs côtés, Valentin découvre totalement l’ambiance des années 60 et surtout… Françoise Hardy, pour laquelle il éprouve un véritable coup de foudre musical. Les textes et les chansons de la star planent sur l’ensemble du roman (lequel est livré avec une playlist yéyé, évidemment). Bien que des sujets sensibles et douloureux émergent au travers du rapport de stage, qu’ils concernent Valentin ou les personnages qui gravitent autour de lui, le roman est résolument optimiste. Il faut dire que l’environnement des années 60, la musique et toute la déco vintage souvent décrite, aident à se mettre dans une ambiance douce, tendre, et gaie.
C’est donc le sourire aux lèvres que l’on lit le rapport de Valentin, avec peut-être une petite pensée pour les professeurs fictifs qui devront éplucher ce long épanchement. Tout ce qu’on espère, c’est qu’ils y auraient pris autant de plaisir que nous !
Ce roman a l’air sympa !