Josie a 16 ans, et elle est surdouée. Elle suit parallèlement son année de lycée et un cursus universitaire à la faculté du coin, avec son ami Stu, surdoué lui aussi. Josie est la petite dernière d’une fratrie de trois sœurs, et tout va plutôt bien dans sa vie. Ou plutôt, tout allait bien jusqu’à ce que Kate, la sœur cadette, présente à toute la famille son fiancé et futur mari Geoff. Geoff, un adulte persuadé de tout savoir mieux que tout le monde, qui envahit l’espace de la famille, et qui change Kate en harpie furieuse et odieuse. Foi de Josie, ça ne se passera pas comme ça. Il est clair dans son esprit que ce type n’est pas fait pour sa sœur, et elle va tout faire pour séparer le couple mal assorti. Dans cette féroce bataille, tous les coups sont permis !
Josie a beau n’avoir que 16 ans, elle sait ce qu’elle veut. Et ce qu’elle veut, c’est que Geoff mette les voiles et lui rende sa sœur. Josie ne va pas attaquer de front tel un rhinocéros en furie. Non, Josie est bien plus fine que cela. Elle va plutôt user de petites piques bien placées, de remarques bien senties, et d’actes délibérés (comme une attaque sournoise au spaghetti-bolognese) contre son futur beau-frère. Lequel n’est, évidemment, pas en reste.
Erin Mc Cahan met en scène une brochette de personnages extrêmement bien croqués : il y a Josie, bien sûr, mais aussi ses nombreux amis du lycée et de la fac. Les sœurs de Josie, Kate et Maggie (et son mari, lequel a su conquérir Josie et se faire accepter), ou les parents – le père psychologue, notamment, vaudrait à lui seul le détour. L’intérêt réside dans les relations qui existent entre eux : entre les trois sœurs de la fratrie, entre les filles et leurs parents (parfois dépassés par l’ampleur du conflit larvé entre Josie et Kate), entre Josie et ses amis ou connaissances, et entre tout ce petit monde. L’autre point particulièrement intéressant, ce sont les investigations de Josie. Celle-ci s’interroge profondément sur l’amour, ses tenants et aboutissants, forcée de constater qu’à 16 ans, elle n’a pas beaucoup d’expérience. Et ses découvertes, au fil du texte, sont intelligemment et finement amenées !
Il y a également toute une réflexion autour du langage proprement passionnante. Josie a du mal à communiquer avec ses pairs car elle s’exprime en « Josie », alors que le langage du lycée est le « Ohmondieu » (beaucoup de glapissements, d’expressions toutes faites et erreurs de langage), une versions sous-évoluée du langage de l’université (le « Ohmondieu 2.0 »). Mais au lycée, il faut également maîtriser le « prof-élève », ou le « parents-enfants ». Bref, autant de langages qui font qu’on se rend compte assez rapidement que l’incompréhension la plus totale menace tout le monde, tant chacun utilise le langage qui lui est le plus familier ! Tout ces décalages, ajouté au regard lui aussi très décalé de Josie (qui semble tantôt avoir 15 ans, tantôt 30), font de Cool sweet hot love un roman extrêmement drôle. Drôle, mais pas pesant. Car toutes les réflexions sont intelligemment amenées, vives, bien tournées, et souvent cocasses. Les dialogues sont à l’avenant, tant les personnages manient avec art l’ironie et la répartie caustique.
Cool sweet hot love est donc à la fois un roman complexe, intelligent, et extrêmement divertissant. La petite guerre qui oppose Josie à Geoff offre un terrain propice à des réflexions bien menées, et à un aspect comique des plus agréables ! D’autant qu’Erin Mc Cahan mène sa barque avec habileté et finesse, sans verser dans le ridicule ou le grotesque, et en maniant aussi bien le registre comique que celui des émotions !
Voilà un roman plaisant à lire, qui met du baume au cœur, et qu’il serait dommage de manquer !
Cool sweet hot love, Erin Mc Cahan. Nathan, 2014. Traduit de l’anglais par Anne Guitton.
Ce livre a l’air très sympa et rafraichissant 🙂