Stefan Zweig, auteur et dramaturge viennois, fait partie des auteurs les plus lus au monde et ce d’autant plus que son œuvre fait désormais partie du domaine public. Sa vie fascine et son personnage fait encore couler de l’encre. Volker Weidermann, écrivain et critique allemand, en fait un des protagonistes de son roman Ostende 1936, récemment sorti chez Piranha.
Ostende, juillet 1936. Stefan Zweig retrouve ses plus proches amis dans la très chic station balnéaire belge. Le soleil, la mer, les amis et leurs compagnons, les cafés, les débats littéraires… tout cela fleure bon les vacances. Mais lorsqu’on s’appelle Stefan Zweig et Joseph Roth, on sait que la pause a des allures de début d’exil. En cet été 1936, les deux auteurs et amis s’apprêtent à fuir l’Allemagne nazie, puisqu’ils y sont indésirables et leurs écrits interdits.
Le roman a donc des parfums de fin de siècle, d’évocations nostalgiques d’une période dont on sent qu’elle s’achève. La parenthèse enchantée a des goûts de « dernière fois ».
Sous la plume de Volker Weidermann, c’est toute la splendeur passée de la station qui ressuscite. Au gré des rencontres, discussions élans du cœur des amis, on plonge dans l’évocation d’une époque troublée. Pourtant, si la plume est vive et le roman habile, l’aspect biographique prend souvent le pas sur la fiction. De fait, on a rapidement l’impression de lire un document, d’une précision quasi journalistique, visant à démontrer l’état d’esprit et les fortes divergences de caractère entre Roth et Zweig, qu’une fiction. Les personnages, si ambitieux soient-ils, restent des êtres de papier : on n’entre jamais dans leur intimité et cette distance un peu froide maintient toujours le lecteur à l’extérieur. D’ailleurs, le dernier chapitre, donnant les itinéraires des uns et des autres, ainsi que de la cité, dans les années qui suivent, est dans la même veine : plus qu’un roman historique, Ostende 1936 est un document romancé, un texte qui fourmille de détail et fait preuve d’une grande précision.
Avec ce texte, Volker Weidermann plonge son lecteur dans un des derniers été presque tranquille. Face à la montée du nazisme, le petit cercle littéraire tente de trouver des parades, de vivre au mieux son exil. Las, comme l’écrit Stefan Zweig à Romain Rolland, aux lendemains du décès de Joseph Roth : « Nous ne devenons pas vieux, nous les exilés ». Triste constat, mais qui colle parfaitement à l’atmosphère délétère de l’époque, si brillamment mise en scène dans le texte.
Ostende 1936 : un été avec Stefan Zweig, Volker Weidermann. Traduit de l’allemand par Frédéric Joly. Piranha, 5 mai 2015.
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