Récit court, mais percutant, Le Citronnier explore les relations d’une jeune femme avec son père défunt, qu’elle n’a connu que deux petites années, autant dire très peu de temps. De cet homme, elle ne conserve aucun souvenir et n’a qu’une poignée de photos. En 1978, son père disparaît : c’est un accident, aux conséquences terribles pour la jeune femme. La narratrice grandit sans père, dans l’ombre de cet inconnu qui lui a donné la vie. Alors la narratrice enquête, plonge dans les souvenirs de la famille, imagine. Elle reconstitue, tant bien que mal, à travers ce qu’on lui dit, qu’elle devine ; les silences, aussi, en disent long. Qui était cet homme ? Quelle aurait été leur relation, s’il avait vécu ?
Le Citronnier est un texte sensible, tout en pudeur et en poésie (c’est d’ailleurs dans la collection « poésie » du Pédalo Ivre qu’il est classé) : en dépit de la dimension autobiographique de ce livre, nous, lecteurs, n’avons jamais l’impression d’être des voyeurs, témoins gênants d’un voyage intime. Au contraire, on se sent conviés dans cette enquête familiale. Samantha Barendson reconstitue, par fragments, un portrait de celui qui fut son père : lui donner corps, lui donner vie, l’idéaliser, un peu. Imaginer le quotidien à ses côtés : fumait-il ? L’aurait-il agacée avec ses cigarettes ? Elle ne le saura hélas jamais mais peut toujours imaginer.
Les pages ne sont pas toutes remplies jusqu’au bout : cette économie de mots souligne l’absence du père et donne une légèreté et du rythme au texte. Le livre est court, se dévore lors d’un trajet de RER, d’une soirée dans son canapé, d’une pause dans un parc : il nous frappe en plein cœur, par sa dimension potentiellement universelle. Chacun peut comprendre la quête de la narratrice, se mettre à sa place un court instant.
Nous ne pouvons qu’être touchés par l’histoire du Citronnier, père devenu arbre. Un très bel hommage au père, indéniablement.
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