La Couturière : destin de deux soeurs, dans le Brésil des années 30 !

ROMAN HISTORIQUE — Retour de vacances ? Déjà marre du train-train quotidien et envie de dépaysement ? Nous avons ce qu’il vous faut, avec une fresque familiale qui transporte le lecteur dans le Brésil des années 20 et 30 : histoire de bandits, et découverte de la bonne société de Recife, La Couturière retrace l’histoire de deux soeurs au destin bien différent !

Dans un petit village du nord du Brésil vivent les soeurs Dos Santos, dans un grand dénuement. Orphelines, elles sont élevées par leur tante, couturière de métier. Alors, depuis l’enfance, les petites Emilia et Luzia ont appris à coudre, dessinant et coupant des robes de mariage, des costumes pour les obsèques de leurs voisins, et tout ce que la Dona locale désire pour son trousseau. Si Emilia est jolie, ambitieuse et romantique, Luzia, elle, est la risée du village : tout le monde sait qu’elle ne se mariera jamais, à cause de son bras déformé, brisé lors d’un accident dont elle ne s’est jamais remis. Emilia rêve de s’en aller, de devenir une dame : Luzia, elle, ne rêve pas, elle est trop pragmatique pour ça. Elle aimerait juste qu’on cesse de se moquer d’elle. Pour faire un parallèle hype, on peut comparer Emilia à Sansa Stark, et Luzia à Arya…

La Couturière, Frances de Pontes Peebles, Points

Un jour, Luzia est enlevée par les cangaceiros, les bandits locaux qui écument la campagne et y font régner leur loi, sous l’égide du terrible Faucon, connu pour énucléer ses victimes. Emilia, elle, fait un beau mariage et quitte le village pour Recife. Dès lors, les soeurs ne se reverront pas mais restent en contact au fil des années… Malgré l’éloignement, les liens fraternels perdurent…

Le lecteur français ne connaît rien de la vie au quotidien dans le Brésil du début du XXe siècle : aux côtés d’Emilia et Luiza, il découvrira une vie dure, marquée par la faim, la sécheresse, les épidémies, et régie par des moeurs très rigides, où l’image et la réputation font tout. Frances de Pontes Peebles donne un contexte historique très poussé à son récit, y détaillant les évolutions politiques du pays, même si elle explique en postface avoir simplifié et inventé beaucoup de choses. Elle dresse un portrait fascinant de la bonne société des grandes métropoles brésiliennes, avec leur modernité, dont s’étonne Emilia, qui découvre des toilettes intérieures, ou les balbutiements de l’air conditionné !

Mais c’est également un roman d’aventure, lorsque nous suivons Luzia, devenue un bandit impitoyable, connue sous le nom de la Couturière, réputée pour son caractère cruel et impitoyable. Nous suivons son évolution morale et politique avec passion : Frances de Pontes Peebles a travaillé sa psychologie avec minutie, montrant avec beaucoup de justesse son entrée en criminalité, sa découverte de la violence, ses éventuels cas de conscience. L’évolution de Luzia est bien sûr à l’opposé de celle de sa soeur : mais les deux sont passionnantes à suivre !

Enfin, c’est un beau témoignage d’amour fraternel. Malgré leurs vies très différentes, malgré leurs conceptions très différentes de la vie, de la famille, ou de la morale, Emilia et Luzia ne perdent jamais leur lien, et continuent à penser l’une à l’autre. Luzia fera ainsi à Emilia le plus beau des cadeaux, tandis qu’Emilia veillera toujours à aider sa petite soeur.

Saluons enfin le style de Frances de Pontes Peebles, qui donne un souffle épique indéniable à cette fresque familiale et historique, tout en mettant en lumière les petits instants de la vie. La métaphore de la couture hante le récit, et sert de fil rouge au roman : c’est un premier roman très réussi, à la fois dense et passionnant.

La Couturière, Frances de Pontes Peebles. Points, juin 2010. Traduit de l’anglais par Martine Leroy-Battistelli.

A propos Emily Costecalde 1036 Articles
Emily est tombée dans le chaudron de la littérature quand elle était toute petite. Travaillant actuellement dans le monde du livre, elle est tout particulièrement férue de littérature américaine.

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