Ainsi résonne l’écho infini des montagnes

La sortie du troisième roman de Khaled Hosseini, six ans après son deuxième livre, était l’événement littéraire de cette fin d’année. Conteur de talent, Khaled Hosseini imagine cette fois un roman choral autour d’Abdullah et de Pari, deux enfants afghans séparés par un drame d’adultes, dans les années 50. Roman très riche, qui fait voyager le lecteur des années 50 à nos jours, de l’Afghanistan à San Francisco, via Paris et la Grèce, Ainsi résonne l’écho infini des montagnes donne voix à des personnages très différents, inextricablement liés entre eux.

Abdullah et Pari vivent dans un petit village afghan, dans les années 1950. Ils ont perdu leur mère quelques années auparavant, leur belle-mère ne leur témoigne aucun amour, et leur père peine à joindre les deux bouts. La faim, le froid l’hiver ou la chaleur extrême l’été, la crasse font partie de leur quotidien. L’horizon semble bien bouché pour les deux enfants, mais au moins, ils ont le bonheur d’être ensemble. Car l’amour fraternel qui lie les deux enfants est extrêmement fort, et Abdullah s’occupe de sa petite sœur comme si elle était sa fille. Mais le destin sépare les deux enfants, qui grandissent chacun de leur côté, dans des mondes tout à fait différents.

Le récit s’ouvre sur un conte afghan qu’Abdullah et Pari écoutent leur père leur conter. Si ce conte, prenant au demeurant, semble ne pas prêter à  conséquence, il est pourtant comme un véritable mode de lecture que nous livrerait Khaled Hosseini, qui, en quelques pages, jette les bases de son intrigue toute entière.

Khaled Hosseini

Donnant la parole à de nombreux personnages, Ainsi résonne l’écho infini des montagnes est un peu comme un puzzle dont le lecteur reconstitue le dessin au fur et à mesure que les personnages lui donnent les pièces, au compte-goutte. Que s’est-il passé pour qu’un frère et une sœur soient brutalement séparés ? Se retrouveront-ils ? Que vivront-ils chacun de leur côté ? Le temps passe, et Khaled Hosseini en profite une nouvelle fois pour esquisser l’histoire contemporaine de l’Afghanistan, avec beaucoup de pudeur et de justesse. Il évoque la curiosité de ceux qui ont eu la chance de quitter le pays avant les événements les plus sanglants, et la douleur de ceux qui ont été chassés et qui, sans terre et sans racines, errent maintenant à la recherche de leur passé. Il dresse le portrait de Kaboul, d’une ville à la beauté passée, au charme fané par la guerre, grâce notamment à la maison des Wahdati, autrefois une demeure cossue, devenue au XXIe siècle le refuge d’humanitaires, qui essaient tant bien que mal de réparer la maison, qui a souffert du passage du temps et de la violence dans les rues. Nabi, oncle d’Abdullah et Pari, y était chauffeur, puis est resté toute sa vie auprès de M. Wahdati, gravement handicapé après une attaque. Dans une longue lettre, Nabi raconte ces longues années de service, et se fait alors le témoin de l’évolution de la vie à Kaboul, non sans une certaine nostalgie.  Son amitié sincère pour M. Wahdati est extrêmement touchante.

Khaled Hosseini, non content d’être un conteur hors-pair, fait preuve de beaucoup de psychologie et de finesse dans la construction de ses personnages, tous blessés par la vie, mais jamais pitoyables. Leur donnant vie tour à tout, variant les types de narration, il construit un roman cohérent et logique, jamais décousu, dans l’émotion, mais sans pathos inutile.

Ainsi résonne l’écho infini des montagnes, Khaled Hosseini. Belfond, novembre 2013.

Par Emily Vaquié

A propos Emily Costecalde 1154 Articles
Emily est tombée dans le chaudron de la littérature quand elle était toute petite. Travaillant actuellement dans le monde du livre, elle est tout particulièrement férue de littérature américaine.

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