De quoi parlez-vous ? au théâtre du Lucernaire

Tchavdar Pentchev, Léonard Prain et Anaïs Merienne dans Le guichet

Depuis le 3 septembre, le théâtre du Lucernaire vous propose le spectacle De quoi parlez-vous ? composé de cinq pièces courtes de Jean Tardieu et mis en scène par Sophie Accard.

Cinq pièces comiques réunies en un spectacle mais un thème unique : le langage, sujet privilégié de l’auteur qui a toujours réussi à faire virevolter les mots avec une incroyable dextérité. Ces pièces posent à la fois des questions sur l’adéquation du mot, sur la puissance de l’intention, sur notre impossibilité à communiquer ou encore sur les malentendus engendrés par les mots. Grâce à des textes qui allient dérision et poésie, les quatre comédiens, dont l’énergie sur scène est époustouflante, nous conduisent – par le rire – dans l’univers déjanté de Tardieu avec une efficacité redoutable. Quant à la mise en scène, elle est réglée au cordeau et ne laisse jamais place à des interruptions. Sophie Accard rythme les mouvements, fixe la durée des silences, règle les débits. Tout est parfaitement maîtrisé par des comédiens qui brillent dans une ambiance qui évoque le monde de l’illusion et de la magie.

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L’avantage du spectacle, c’est qu’il nous invite à redécouvrir les textes de Jean Tardieu pour notre plus grand bonheur. Si les cinq pièces mises en scène dans De quoi parlez-vous ? révèlent, chacune à leur manière, le génie du dramaturge, il me semble que la dernière, Un mot pour un autre, est tout particulièrement formidable. On est frappé par l’inéquation du mot employé. L’idée que la parole ne fasse plus sens est révoltante et qui mieux que Tardieu dans sa Comédie du langage illustre l’absurdité du langage lorsque, dénué de raison, il n’est plus que babillage ? Mais cette pièce nous révèle autre chose. Le langage est un art, il peut être beau lorsque l’on s’attache aux sonorités, il existe une poésie de la langue qui est indépendante du sens que charrie cet assemblage de signifiants. J’applaudis ceux qui feraient le choix de parler en sonorités bien que la tâche se révèle ardue pour obtenir des croissants chauds à la boulangerie. En effet, on réalise malgré tout que cet art du langage est inapplicable dans la discussion quotidienne. Aujourd’hui, il faut que les mots, les phrases traduisent des idées claires et distinctes et que le langage se mette très sérieusement au service de l’esprit…

C’est pourquoi, de tout cœur, je hurle en tâchant d’introduire dans mon appel de belles sonorités et une harmonie dans les signifiants : dépêchez-vous d’aller applaudir cette troupe talentueuse et prometteuse !

Au théâtre du Lucernaire jusqu’au 8 novembre 2014

Manufacture des Abbesses du 9 novembre au 30 décembre

Par Inès

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