Clélie Avit a remporté le prix Nouveau Talent 2015 de la Fondation Bouygues Télécom avec le roman Je suis là, dont les droits de traduction ont déjà été vendus dans des dizaines de pays, assurant la traduction du roman dans au moins 19 langues !
Je suis là, c’est l’histoire d’Elsa. Et justement, Elsa n’est plus là. Elle a décroché en montagne, s’est retrouvée ensevelie sous une avalanche et, si elle a été sauvée par son compagnon de cordée, le manque d’oxygène l’a plongée dans le coma. Depuis des mois, Elsa végète sur un lit d’hôpital et l’équipe médicale essaie de convaincre la famille… de la débrancher.
Thibault, de son côté, vient régulièrement à l’hôpital : il accompagne sa mère, laquelle rend visite à son autre fils – le frère de Thibault donc. Ivre, il a renversé et tué un adolescent. Thibault ne lui pardonne pas et se refuse à le visiter, ne parvenant à passer outre cette impardonnable faute. Un jour qu’il cherche un endroit où piquer un roupillon le temps que sa génitrice accomplisse ses devoirs de mère, il entre par erreur dans la chambre d’Elsa. La voyant profondément endormie, il regarde la pancarte au pied du lit et s’aperçoit, d’une part, que c’est l’anniversaire de la jeune femme et, d’autre part, qu’elle est donc dans le coma. Il décide alors de lui parler de tout et rien. Ce qu’il ignore – ainsi que le personnel médical ou les proches d’Elsa – c’est qu’elle entend absolument tout ce qui se passe. Les discours de Thibault, les hésitations de sa famille, le désarroi des proches, l’indifférence de certains médecins…
Thibault, de son côté, s’attache à sa camarade de chambrée, qu’il rejoint toutes les semaines le temps que sa mère visite son frère, qu’il continue d’ignorer. Et, peu à peu, il est bien obligé de reconnaître qu’il tombe amoureux de la jeune femme alors qu’il ne sait rien d’elle.
« Peut-on tomber amoureux simplement en s’allongeant près d’une personne endormie ? » C’est la question que s’est posée Clélie Avit. Et elle y répond de façon assez directe : c’est clair, on ne se perd pas en fioritures et l’auteur va droit au but.
Peut-être un peu trop, justement, ce qui est vraiment l’aspect le plus gênant du roman. Car hormis l’histoire entre Thibault et Elsa, difficile d’avoir des détails. A commencer par les personnages. Elsa aime la montagne et… la montagne. En fait, on n’en saura pas franchement plus. Ses amis la visitent sporadiquement, mais ne parlent de rien (ou plutôt, de rien à propos du passé de la jeune femme, puisqu’ils sont tout occupés par son coma en cours), et l’esprit de la jeune femme est entièrement tourné vers le mouvement qu’elle aimerait tellement pouvoir faire et des souvenirs pleins de glace. Du côté de Thibault, on n’en saura guère plus. Il bosse dans l’écologie (sans plus de précision), engloutit des tombereaux de jus de poire (il a sûrement des actions chez un producteur), est malheureux en amour, mais crève d’envie devant le couple idyllique de son meilleur ami et la gamine de ce dernier. C’est un peu vague, il faut en convenir. Du coup, Thibault semble un tantinet monolithique, malgré ses intenses questionnements sur la nature de ses sentiments et sur la relation qui le relie à Elsa.
De plus, si le style est simple et fluide, il y a tout de même quelques longueurs qui plombent un peu l’ensemble. Comme l’histoire est narrée par Elsa et Thibault en alternance, il y a quelques redites de-ci de-là, notamment du côté du jeune homme. Heureusement, on se rattrape amplement avec le point de vue d’Elsa dont les préoccupations très immédiates se parent d’une teinte follement dramatique à mesure que le temps passe ! De plus, avoir le point de vue de la personne dans le coma change agréablement et apporte une touche originale.
Malgré tout, ce remake de la belle au bois dormant – les côtés les plus trash du conte originel en moins – est plutôt mignon !
Je suis là, Clélie Avit. JC Lattès, mai 2015.
Oui, voilà, c’est mignon… pas de quoi casser 3 pattes à un canard néanmoins…
Exactement ! C’est pile ce que j’aime lire l’été : pas prise de tête pour un sou !