U4 est une série un peu particulière. Pas parce qu’elle comporte quatre tomes, non ! Mais plutôt parce qu’elle réunit quatre auteurs autour d’un concept et d’un univers communs. Et il fallait bien deux éditeurs jeunesse, Nathan et Syros, pour soutenir l’ambitieux projet ! U4, ce sont donc quatre romans, ce sont donc quatre romans Yannis, Jules, Stéphane et Koridwen, respectivement écrits par Florence Hinckel, Carole Trébor, Vincent Villeminot et Yves Grevet, narrant les aventures des personnages éponymes dans une France tout ce qu’il y a de plus apocalyptiques. En effet, U4 est un filovirus qui, en quelques jours, a quasiment totalement anéanti la population mondiale, épargnant seulement les adolescents.
Jules vit à Paris et, depuis trois semaines, c’est l’horreur. Son immeuble est vide, la rue est un charnier, son frère est aux abonnés absents. Jules est seul et désespère de revoir un jour âme qui vive. Il tombe totalement par hasard sur Alicia, une gamine paumée qui se terre dans l’appartement du pédiatre de l’immeuble. Mutique, elle vit enfermée dans l’univers de Dora l’exploratrice, dont elle a manifestement fait son idole. Jules décide de la sauver coûte que coûte.
La chance lui sourit enfin lorsqu’il tombe sur une bande d’adolescents tentant de survivre en communauté, parmi lesquels deux amis d’enfance dont il s’était un peu éloigné en raison de son addiction au jeu vidéo Warriors Of Time. D’ailleurs, Jules a un peu peur de l’avouer à ses amis, mais le maître du jeu de WOT a donné rendez-vous aux joueurs sous la tour de l’Horloge, à Paris, le 24 décembre. Jules est persuadé qu’il y trouvera le moyen de sauver le monde…
Paris sombre, peu à peu, dans un indescriptible chaos : alors que l’armée décide – assez vite – de parquer les jeunes survivants, puis de tirer à vue sur tout ce qui ressemble de près ou de loin à un jeune adulte, les adolescents organisent la survie, se réunissant peu à peu en petits clans aux motivations bien spécifiques. Les Sauveurs, cantonnés dans la ménagerie dont ils ambitionnent de sauver les animaux, les Dévoreurs, qui dressent de redoutables pitbulls à tuer les gens, les Graffeurs, qui n’ont d’autre ambition que recouvrir Paris de peintures murales, le Gang du 16e, qui tient ses drogués en réclamant des bijoux de famille, les Chinois qui colonisent le 13e et… notre petite communauté, qui se contente de vivre dans un immeuble près du jardin du Luxembourg. Là, chacun a ses responsabilités : assurer la survie des troupes, préparer des plans de batailles stratégiques, nourrir et approvisionner, soigner, constituer une documentation indispensable pour survivre… Comme la vie est bien faite, nos adolescents sont plutôt doués dans leurs domaines respectifs : ils soignent, manient les armes et protègent leur communauté sans sourciller.
Mais ce n’est pas le seul cliché que l’on croise dans le roman. Il faudrait y ajouter la crétinerie ambiante des militaires, plus occupés à faire des cartons pleins qu’à sauver les miches de leur pays. D’ailleurs, on se demande bien pour quelle excellente raison on déclare l’état de siège, plutôt que de tâcher d’épauler les survivants… Après tout, s’il ne reste que des adolescents en vie, l’humanité est peut-être dans la panade, non ?
A cela s’ajoute le style très oral dans lequel s’exprime Jules, narrateur de l’histoire, et qui n’aide pas à éprouver de l’empathie, tant ses pensées peuvent sembler, au mieux, agaçantes, au pire, saugrenues. Jules n’est présenté que comme un adolescent difficilement capable de faire la différence entre réel et virtuel et, dans un contexte apocalyptique, cela donne rapidement envie de lui coller des baffes.
L’histoire autour du jeu vidéo Warriors of Time est très légère : si Jules a construit toute sa personnalité de survivant sur cela, cela sert juste de signe de reconnaissance à Koridwen, Stéphane et Yannis, que l’on croise successivement au fil des pages.
Débuter la série par Jules n’était donc manifestement pas la meilleure des idées, tant son histoire réunit les clichés les plus en vogue de la littérature post-apocalyptique. Malgré tout, ce que l’on devine de ses trois camarades suffit à intriguer pour donner envie de se pencher sur leurs parcours.
U4 : Jules, Carole Trébor. Nathan / Syros, 27 août 2015.
Soyez le premier à commenter