ROMAN EFFRAYANT — Encensée par Sara Shepard ou encore Stephenie Meyer, adoubée par R. L. Stine : Lois Duncan n’a rien d’une débutante sur la scène littéraire jeunesse. Encore moins lorsque l’on se rend compte que Blackwood, qui vient de paraître en français chez Black Moon, est sorti aux Etats-Unis en 1974 ! Voyons donc ce que donne ce roman, remis au goût du jour en 2011.
La jeune Kit va être placée en pension : la perspective n’a rien de réjouissant pour l’adolescente, qui aurait bien suivi sa mère et son nouveau beau-père en lune de miel en Europe. Mais le malaise se fait encore plus fort lorsque Kit découvre l’endroit où elle va passer l’année scolaire : le pensionnat de Blackwood, perdu dans la campagne américaine. Le lieu est particulièrement sinistre, bien qu’il ait été admirablement rénové. Kit a même l’impression que le manoir est tout bonnement maléfique…
Chouette, vous direz-vous. Une histoire de maison hantée ! Effectivement, Lois Duncan joue avec l’idée de la bâtisse sinistre, qui a connu en ses murs son lot de tragédies et qui semble aujourd’hui encore hantée par le souvenir des drames en question. Le pensionnat joue en effet à fond la carte de la bâtisse hantée, des baldaquins en velours aux couloirs mal éclairés, sans compter le miroir judicieusement placé qui vous donne l’impression de voir d’étranges silhouettes dans l’obscurité (la vôtre, en fait). C’est dans ce cadre que Kit doit mener une année studieuse. Pas facile.
D’autant que le décor, ou son isolement, ne sont pas les uniques bizarreries de Blackwood : le fait que le pensionnat n’accueille que quatre étudiantes est en soi plutôt douteux. Kit est bien décidée à découvrir ce qui se trame à Blackwood et d’où viennent les cauchemars qui assaillent ses camarades.
Malgré un point de départ intéressant et des révélations originales, Blackwood peine à convaincre. L’intrigue aurait mérité d’être davantage creusée : elle est résolue bien trop rapidement, et le suspense ne fait pas long feu : les jeunes filles ont bien vite fait de découvrir les clefs du mystère. Lesdites jeunes filles s’avèrent d’ailleurs bien trop stéréotypées pour retenir durablement l’attention du lecteur : l’intello pas jolie mais ambitieuse, la jolie fille un peu bébête, l’héroïne rebelle et la bonne copine qui ne sert pas à grand chose… C’est dommage, car elles nous agacent plus qu’elles ne nous donnent envie de suivre leur histoire. Ladite histoire se termine un peu brusquement, et nous laisse une nouvelle fois sur notre faim : on aurait bien aimé en savoir plus, voir nos héroïnes se battre un peu plus. Le ressort final tient presque du deus ex machina, et la reddition de la méchante pourrait être résumée par « Non, je ne vous laisserai pas partir. Bon, OK, très bien, allez-y, je sais que j’ai perdu. »
Il est difficile de se dire que ce roman jeunesse est devenu suffisamment « classique » outre-Atlantique pour qu’un éditeur envisage une réédition assorti d’une remise au goût du jour, suivi d’une traduction dans de nouveaux pays, tant il semble fade. Peut-être notre esprit de lecteur a été trop abondamment bercé par de nombreuses histoires similaires (les romans jeunesse se passant dans des pensionnats sont légion, ne citons par exemple que Les Variants ou encore Night School, sans évoquer ceux qui traitent de lieux hantés) sorties à foison depuis la première publication de Blackwood dans les années 70… Notre jugement est donc sans doute plus acéré. Nous avouons tout de même avoir passé un moment de lecture honnête avec Kit et ses comparses… mais qui ne nous laissera pas un souvenir impérissable.
MiniCajou (10 ans) l’a lu et elle l’a bien aimé, et il a réussi à la faire frissonner quelques fois… Mais il ne fait pas partie de ses favoris ^^