CINÉMA — Et si l’on vous donnait la possibilité de commencer une nouvelle vie, loin de tout ce que vous avez connu, accepteriez-vous ? C’est parce qu’ils ont répondu « oui » à cette question que 5 000 passagers ont embarqué sur l’Avalon pour un voyage de 120 ans, direction une nouvelle planète à coloniser. Nombreux sont les romans et les films de science-fiction à partir de ce postulat de départ, comme Le Papillon des étoiles, de Bernard Werber, ou, pour la jeunesse, la trilogie Mission Nouvelle Terre d’Amy Kathleen Ryan. Dans Passengers, cependant, les colons sont plongés dans un profond sommeil, bien en sécurité dans un module d’hibernation, pendant que le vaisseau se dirige seul dans l’immensité galactique.
Ce vaisseau de luxe, conçu comme un paquebot de croisière hyper perfectionné, réveillera ses occupants quatre mois avant l’arrivée sur la planète Homestead II, afin de les préparer au mieux à leur nouvelle vie coloniale. Lorsque Jim Preston ouvre les yeux, il est persuadé de sortir d’un sommeil de plus d’un siècle. Il se rend bien vite compte qu’il n’en est rien. Homestead II est encore à quelques quatre-vingt-dix ans de voyage et il est le seul à être réveillé, sans espoir de pouvoir hiberner de nouveau.
Commence alors pour Jim une quête désespérée : il cherche par tous les moyens à réparer son module d’hibernation, à pouvoir retrouver cet état de veille qui lui permettrait de survoler ces décennies de voyage pour arriver frais et dispo sur sa nouvelle planète. Hélas, rien n’y fait, et Jim passe une année seul, à errer dans le vaisseau et à profiter de ses aménagements, avec pour unique compagnie la présence artificielle d’un androïde barman prénommé Arthur, qui semble tout droit sorti de l’hôtel Overlook de Kubrick.
Pour Jim n’existe plus alors que la perspective de décennies à vivre livré à lui-même, sans véritable être humain à qui parler : une solitude qui se fait de plus en plus pesante, jusqu’à ce que Jim en vienne à un terrible dilemme : mettre fin à ses jours, ou réveiller un autre passager pour ne plus être seul. Le film montre admirablement ce cheminement terrible, cette solitude qui vous mène aux confins de la folie, et cette culpabilité croissante à l’idée de ce que notre héros s’apprête à faire : priver de son futur un autre passager. Son choix se porte sur la jeune et belle Aurora, dont il tombe amoureux en parcourant son profil voyageur et en lisant les livres qu’elle a écrit. Il la réveille donc, et vous l’aurez deviné, nos deux jeunes et beaux héros deviennent bien vite amants…
Chris Pratt et Jennifer Lawrence excellent dans l’incarnation de ce couple qui apprend à se connaître dans des circonstances pour le moins extraordinaires : ils parviennent à donner aux tâtonnements du début beaucoup de légèreté et de réalisme, le spectateur oubliant même que leur relation est basée sur une épouvantable trahison, sur l’acte odieux commis par Jim. On nous offre alors comme une parenthèse enchantée, dans un décor onirique, avec l’espace en arrière-plan. Il faut dire que que le film est visuellement très réussi, offrant fréquemment au regard les lignes élancées du vaisseau dans l’immensité de l’univers, avec en toile de fond l’obscurité veloutée et piquetée d’étoiles du néant. L’intérieur de l’Avalon, pour aseptisé et sans charme qu’il puisse paraître de prime abord, regorge de petites surprises, comme cette piscine dans laquelle on voit s’ébattre Jennifer Lawrence et qui donne sur un hublot, donnant l’impression que l’étendue d’eau est infinie, ou ces baies vitrées où l’on peut observer la surface d’une étoile au large de laquelle le vaisseau voyage. On a rêvé pire décor pour une idylle, si on fait abstraction du fait que nos héros sont seuls au monde et condamnés à le rester. Mais n’est-ce pas là une métaphore du début de la vie de couple, quand les jeunes amoureux donnent l’impression d’être seuls au monde, tout à leur bonheur ?
Bien sûr, les choses se gâtent. La bulle enchantée éclate. Le réalisateur introduit alors tout un tas de péripéties : d’histoire d’amour spatiale, le film prend des allures de blockbuster d’action avec des problèmes très concrets à résoudre, avec pour enjeu rien de moins que la vie ou la mort. La tension grimpe d’un cran, le spectateur se cramponne à son siège. La poésie du début fait place à des scènes d’action intenses, avec du sang, des flammes, de la sueur et des larmes. De ce point de vue-là, Passengers n’a rien inventé. On dira même que c’est un peu précipité, cousu de fil blanc, et finalement plein de bons sentiments. On retiendra plutôt le jeu des acteurs, Chris Pratt résolument touchant, Jennifer Lawrence éminemment lumineuse, tous deux totalement humains, qui brillent dans un film de divertissement spatial plutôt efficace.
Ahhh j’avais vu la bande-annonce et ça avait l’air trop cool ! Je veux le voiiiir !
C’est vraiment pas mal, on conseille ! 🙂 On ne voit pas passer les deux heures de film !