Le Gang des rêves : New York, New York…

Le Gang des rêves, Luca Di Fulvio

NEW YORK — Attention : coup de coeur ! Fresque historique et familiale, qui nous transporte dans le New York du début du XXe siècle, Le Gang des rêves avait absolument tout pour me plaire et il tient finalement toutes ses promesses et plus encore !

Car Le Gang des rêves, c’est à la fois un roman d’apprentissage dans la folie des années 20, une très belle histoire d’amour, une histoire de l’art et des médias (photographie, radio, cinéma, théâtre…), un roman sur l’immigration, la pègre, la prostitution… Luca Di Fulvio nous livre un roman incroyablement dense, et pourtant jamais lourd, porté par un souffle romanesque indéniable ! Voilà un page-turner d’une grande puissance, dont je vous parle aujourd’hui avec passion, sitôt ma lecture terminée !

Tout commence par un viol, celui de Cetta, une petite Italienne de treize ans. Son enfant dans les bras, l’adolescente embarque à Naples, direction le nouveau monde, où elle pourra reconstruire sa vie. Le Gang des rêves, c’est l’histoire de cet enfant né d’un viol : Christmas Luminata.

Pour son fils, Cetta ne rêve que d’une chose : qu’il soit américain, qu’il s’intègre, qu’il réussisse. Christmas grandit dans un quartier sordide de New York, et le lecteur suit son éducation, ses projets, ses rêves et enfin, sa réussite. Personnage extrêmement attachant, à la gouaille rafraîchissante, malin comme un sage, Christmas devient adulte sous nos yeux, dans un quartier rongé par la misère, et gangréné par le crime. Comme tous les garçons du Lower East Side, il rêve d’appartenir à une bande. On le lui refuse ? Qu’à cela ne tienne ! Il créera la sienne. Même si celle-ci ne repose que sur du vent… Le Gang des rêves, c’est l’ascension irrésistible d’un garçon du caniveau jusqu’aux lumières du beau monde…

Luca Di Fulvio parvient à rendre avec brio l’ambiance qui règne dans le quartier de Christmas : il dresse aussi avec talent le portrait des gangsters qui y font la loi, et de cette époque dominée par la Prohibition, dans laquelle évoluent les contrebandiers et les flappers. Il donne beaucoup de vie à cette période un peu folle, juste avant la Grande Dépression. Et avant cela, nous découvrons Ellis Island en 1907, quand Cetta, alors toute jeune adolescente, descend du bateau des rêves plein la tête. Luca Di Fulvio fait le tour des diverses communautés qui font alors New York : les Italiens, bien sûr, mais aussi les Juifs, les Irlandais, les Afro-américains… Tous se définissent davantage par leurs origines que par leur état actuel, celui de citoyen américain. Christmas, lui, se revendique américain : sa mère le lui a bien souvent répété, allant jusqu’à bannir de la maison leur langue maternelle, l’italien. Formidable description d’un New York aujourd’hui disparu, Le Gang des rêves est une incroyable déclaration d’amour à une ville qui fut pendant longtemps la porte d’entrée de l’Amérique. Le roman permet aussi une excursion à Los Angeles, dans un Hollywood en plein essor, où nous croiserons certaines des stars les plus célèbres de l’époque ! Cette parenthèse permet aussi à l’auteur de faire une critique féroce du monde du cinéma, et des désirs toujours plus violents du spectateur, constat toujours plus vrai de nos jours…

Transcendant ce roman d’apprentissage qui nous immerge dans l’univers de la pègre, puis de la radio, une belle histoire d’amour qui, comme l’histoire de Christmas, naît d’un crime, illumine le récit. Luca Di Fulvio joue avec talent avec la psychologie de ses personnages, explorant aussi bien les traumatismes et les peurs que les espoirs et les rêves de ses protagonistes. Cette histoire est à la fois évidente, et difficile, et on prend beaucoup de plaisir à la voir évoluer.

Le Gang des rêves est un roman ultra maîtrisé, qui se dévore d’une traite malgré les plus de sept cents pages qui le composent : il a tout ce qu’il faut là où il faut, et nous le quittons à regret, avec le sentiment d’avoir découvert une belle pépite. Nous ne pouvons que vous conseiller de l’emporter dans vos bagages cet été, vous n’avez plus d’excuse, il est désormais disponible en version poche ! On vous l’a dit, et on vous le répète : c’est un coup de coeur !

Le Gang des rêves, Luca Di Fulvio. Pocket éditions, 2017. Traduit de l’italien par Elsa Damien.

A propos Emily Costecalde 1154 Articles
Emily est tombée dans le chaudron de la littérature quand elle était toute petite. Travaillant actuellement dans le monde du livre, elle est tout particulièrement férue de littérature américaine.

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