FANTASY — Ô joie ! L’heure est venue de retrouver Locke Lamora, le héros des Salauds Gentilshommes, pour un troisième tome de fantasy à capuche. Car on adore sa verve légendaire, ses insultes si poétiques et son sens de l’honneur. Mais que cache donc La République des voleurs ?
Après le plus grand casse de leur carrière dans le tome précédent, Locke et son complice Jean ont réussi non sans mal à s’échapper. Mais Locke est en grave difficulté : empoisonné par un produit des plus mystérieux pour lequel aucun antidote n’existe, il se meurt à petit feu. Inexorablement. Jean met tout en œuvre pour sauver son ami : alchimiste, médecin, tous sont convoqués au chevet du patient dans l’espoir de le sauver. Hélas, aucun n’y parvient. Jusqu’à ce qu’une mystérieuse Mage Esclave lui propose un marché. Sa vie en échange d’une mission : faire gagner son parti aux prochaines élections de la ville de Karthain, la cité des mages. Et là, surprise ! Jean et Locke retrouvent leur ancienne complice Sabetha … et c’est elle qu’ils vont devoir affronter. Non seulement rusée et habile, Sabetha est aussi le seul et unique amour de Locke. Autant dire qu’il va y avoir des étincelles !
Locke et Sabetha … vaste sujet ! Ils sont aussi agaçants que mignons et on passe une bonne moitié du roman à vouloir les secouer un peu (doux euphémisme !). Car Sabetha est aussi changeante que Locke est à la limite du pathétique en ce qui concerne leurs sentiments respectifs. Ce qui est rassurant, c’est que le lecteur n’est pas seul dans cette histoire. On voit bien que tous ces “Je t’aime, je te fuis, je ne te mérite pas, tu ne me mérites pas” fatiguent également Jean Tannen qui se montre d’une patience exemplaire. Et si leurs émois adolescents traînaient déjà en longueur, que dire de leurs retrouvailles adultes ! Mais bon, c’est tout le sel des relations et ça participe sans aucun doute à la tension du roman.
Mais c’est là le seul bémol de ce récit. Sinon quel plaisir de découvrir avec Locke une nouvelle ville de cet univers. Car contrairement au tome précédent, adieu les océans (encore que…) : nos héros arpentent de nouveau la terre ferme. Et après s’être frottés à la piraterie, nos compères découvrent les dessous peu reluisants de la politique et des campagnes électorales. Mais pas seulement ! Puisque le récit joue sur deux temporalités différentes, cela nous permet d’en découvrir un peu plus sur les années de formations de Locke au sein des Salauds Gentilshommes. On le découvre ainsi acteur au sein d’une troupe de théâtre, en compagnie de Jean, Sabetha et des regrettés frères Sanza. On sent d’ailleurs tout le soin et la profondeur qui sont amenés à chacun des personnages qui s’étoffent au fil des chapitres.
Si on résume, nous avons un début sur les chapeaux de roue , quelques longueurs dans le récit et une fin exaltante ! Ce troisième tome est sans aucun doute le plus inégal des trois déjà parus, mais cela s’explique et se pardonne aisément au vu des confessions de l’auteur. Car Scott Lynch ne s’en cache pas : il lutte depuis plusieurs années déjà contre la dépression et le rythme de ce tome 3 reflète sans aucun doute les écueils traversés.
Quoi qu’il en soit, on attend avec impatience le tome 4, a priori annoncé pour 2021 ; on croise très fort les doigts pour qu’il ne soit pas retardé et qu’il traverse vite l’Atlantique.
Les Salauds Gentilshommes, tome 3 : La république des voleurs, de Scott Lynch. Traduit de l’Anglais (États-Unis) par Olivier Debernard. Bragelonne, octobre 2020.
Soyez le premier à commenter