La Dame des murs : coup de coeur au rayon jeunesse

LITTÉRATURE JEUNESSE — En littérature jeunesse, Silène Edgar est une valeur sûre : elle sait toujours mettre avec justesse l’histoire au service de l’Histoire (14-14, Les Lettres volées, Moana, …). Elle nous emmène cette fois-ci sur les traces de Mara et de son enfance en Lettonie, de l’autre côté du rideau de fer. Mais Silène Edgar n’est pas seule pour signer ce roman : son grand complice Paul Beorn (Calame, Le Septième guerrier-mage) participe également. À travers quelques lettres incluses dans La Dame des murs, il se fait l’écho de toutes ces personnes victimes encore aujourd’hui des frontières qui séparent les familles.

Mara Galanta est une célèbre chanteuse d’opéra. Depuis qu’elle a chanté en 1972 au pied du mur de Berlin, des anonymes du monde entier lui écrivent pour lui parler de « leur mur ». Celui qui les sépare de la liberté ou bien encore de leur famille. Rebelle, riche et talentueuse, Mara est aussi une grand-mère peu attentionnée, irritable et solitaire. Emma, sa petite-fille, est au contraire impétueuse et spontanée. Elle ne manque pas d’humour et ressemble plus à sa grand-mère qu’elle ne voudrait le reconnaître. À 14 ans, la jeune fille se cherche encore et aimerait en apprendre plus sur ses racines. Mais sa grand-mère, déjà peu présente, refuse de lui en dire plus sur l’histoire familiale. Elle sait juste que Mara vient de Lettonie. Mais pourquoi autant de secrets, si longtemps après la chute de l’union soviétique ? Alors quand Mara propose à sa petite-fille de l’emmener en vacances et de choisir elle-même sa destination, Emma n’hésite pas une seconde : elle veut découvrir la Lettonie … et par la même occasion leurs histoires de famille. Mara ne peut cette fois pas refuser. Ce dont elles ne se doutaient pas, par contre, c’est qu’une vieille dame mystérieuse et un souffle de magie allaient s’en mêler. C’est le début d’un voyage dans le temps qui va réveiller bien des souvenirs.

Une fois de plus avec cette autrice, le parti pris est original et bien pensé. Elle aurait pu aborder cette histoire du point de vue du plus fameux des murs, celui de Berlin. Mais il n’en est rien ! Elle préfère nous emmener à la découverte d’un pan moins connu en France de l’Histoire moderne, celui de la Lettonie. En suivant Mara et Emma, c’est donc l’histoire et la culture de ce pays que l’on découvre. Avec elles, on se perd et on flâne dans les rues de Riga, on découvre les côtes de la mer Baltique et on comprend un peu mieux ce qui s’est joué là-bas lors de l’occupation par les soviétiques. Cette lecture est une belle opportunité pour les jeunes lecteurs d’aujourd’hui d’aborder toute une période de notre histoire de manière touchante et immersive, bien loin des manuels d’histoire-géographie (même si les deux se complètent très bien !). Car si nos grands-parents et nos parents ont vécu cette scission Est-Ouest, ce n’est pas le cas des nouvelles générations, qui sont nées avec la construction d’une Europe plus apaisée. Mais les lettres (écrites par Paul Beorn) reçues par Mara témoignent que tout n’est pas encore rose et que beaucoup trop de gens à travers le monde souffrent encore des dictatures et de l’absence de libertés.

La Dame des murs est donc un roman jeunesse (dès 12 ans !) comme on aimerait en voir plus ! Intelligent, entraînant, touchant : il a tout pour séduire son jeune lecteur et … les moins jeunes autour de lui. Sous couvert d’une histoire palpitante, on en apprend beaucoup sur la Lettonie et son occupation en compagnie d’un binôme mamie/petite-fille des plus attachants. Le mot de la fin ? C’est un coup de cœur !

La Dame des Murs, Silène Edgar (avec la participation de Paul Beorn). Castelmore, mars 2021.

Par Coralie.

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