L’America : amours tragiques en Sicile

L'America, Michel Moutot

ROMAN HISTORIQUE — Après le très enthousiasmant Séquoias, nous étions très curieux de découvrir L’America, troisième roman de Michel Moutot qui entraîne le lecteur de Trapani en Sicile jusqu’en Californie, via New York et La Nouvelle Orléans, à l’orée du XXe siècle. Ce roman est-il aussi réussi que le précédent ?

Peut-on faire résumé plus séduisant que celui de L’America ? Des amours contrariés d’un pauvre pêcheur sicilien et de la fille d’un mafioso en 1902 va naître un grand roman d’aventure, qui jettera nos deux personnages sur les routes de l’Amérique…

Vitto est tombé amoureux de la mauvaise jeune fille, et il va le payer très cher. Il suffit d’une nuit d’amour pour que sa vie bascule. Obligé de fuir son village en pleine nuit, devenu un meurtrier malgré lui, il ne pourra survivre que s’il quitte le pays. À l’époque, le nouveau monde fait tourner la tête des Italiens. Vitto s’embarque donc pour l’Amérique avec à ses basques le terrible Don Salva, mafioso en pleine ascension, prêt à tout pour venger l’honneur de sa fille et la mort de son fils… De son côté, Ana, la fille du mafioso, découvre bien vite qu’elle est enceinte. Mariée de force en catastrophe, elle ne rêve que de retrouver l’homme qu’elle aime par-delà les mers…

Roman hautement efficace, avec ses chapitres courts et percutants, et son suspense permanent, L’America est avant tout un récit historique de haute volée, qui donne vie à plus d’un siècle de distance aux ports de pêche siciliens en 1902, aux filatures de New York, aux quais de la Nouvelle-Orléans, aux rues de Monterey à la grande époque de la sardine. Quand on devine que Vitto sera en Californie en 1906, année du grand tremblement de terre qui rasa San Francisco, on n’attend qu’une chose, que Michel Moutot décrive le cataclysme, ce qu’il fera effectivement avec son style très visuel, très percutant. Le lecteur croisera même entre les pages le célèbre Jack London… Le voyage est fascinant ! On en voudrait davantage…

Grand roman historique, certes, mais également une belle histoire d’amour contrariée mais jamais niaise : Michel Moutot insuffle un peu de réalité dans cette romance. Une unique nuit d’amour idéalisée, seule manière pour Ana de conserver de l’espoir dans une vie qu’elle déteste, aux côtés d’un mari violent… mais cela suffit-il à faire un couple ? Le cheminement de Vitto et d’Ana vis à vis de cette idylle contrariée est bien menée, avec ses doutes, ses certitudes… et son dénouement qui fiche une véritable claque au lecteur et donne tout son sel au roman !

Si Séquoias reste notre roman préféré de l’auteur, L’America est une belle découverte, avec tout ce qu’il faut là où il faut : l’Histoire avec un grand H, la romance, le souffle de l’aventure, le style efficace. Michel Moutot a décidément gagné une fan !

L’America, Michel Moutot. Points, juin 2021.

A propos Emily Costecalde 1036 Articles
Emily est tombée dans le chaudron de la littérature quand elle était toute petite. Travaillant actuellement dans le monde du livre, elle est tout particulièrement férue de littérature américaine.

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