ROMAN HISTORIQUE — Après trois tomes très prenants, on avait hâte de retrouver Uthred et ses petits camarades, dans l’Angleterre du IXe siècle. Et si ce tome est le moins historique des quatre, le rythme était tout de même au rendez-vous !
Un royaume dane au nord, un royaume saxon au sud : voilà à quoi ressemble l’Angleterre en cette année 885 quand des mercenaires norses s’emparent de Londres afin de contrôler la Tamise, menaçant ainsi l’équilibre fragile de la paix. Alfred, le roi des Saxons, convoque aussitôt son plus valeureux et ambigu seigneur, le comte Uthred, et le charge de reconquérir la ville avant l’avènement du printemps, pour l’offrir comme cadeau de mariage à Aethelfled, sa fille, qu’il marie au détestable Aethelred, cousin d’Uthred. Or, comme toujours, la loyauté d’Uthred sera mise à rude épreuve, lui qui apprécie autant les Danes que les Saxons. Et ce d’autant qu’un scalde dane revenu d’entre les morts lui a promis qu’il serait roi de Mercie… le comté justement destiné à son cousin ! Qui l’épée d’Uthred va-t-elle finalement servir ?
Et oui, encore un dilemme moral pour Uthred, partagé comme toujours entre son serment de loyauté à Alfred (qui prend un malin plaisir à le lui faire renouveler sans cesse !) et son amour pour la culture dane. On ajoute à cela une nouvelle dimension morale : si Uthred déteste son cousin (qui le mérite bien, soyons honnête), il aime Aethelfled comme sa fille, et se plierait en quatre pour elle (ce qu’il fait, d’ailleurs).
Malgré la mise en avant de deux personnages jusque-là restés en toile de fond, on peut dire que côté personnages, malheureusement, “on prend les mêmes et on recommence” : comme toujours, notre seul point de vue est celui d’Uthred, dont on peut résumer la figure à celle du barbare illettré détestant les chrétiens et le faisant bien savoir. Les femmes, comme toujours, ne sont bonnes qu’à être engrossées (et ce seulement si elles sont assez jeunes…) ou violées après mise à sac de leur cité. Au bout de quatre tomes, il faut reconnaître que c’est un peu lassant… De fait, si le rythme et le suspense sont au rendez-vous de cette intrigue, l’absence d’évolution des personnages donne l’impression que l’on n’avance pas tellement dans l’histoire.
Heureusement, comme dans les tomes précédents, l’intrigue est riche en rebondissements et retournements de situation, généralement liés à des combats – ce tome en regorge particulièrement.
C’est également un roman plus politique : l’idée de l’Angleterre est évoquée pour la première fois et on perçoit le côté stratège d’Alfred, qui tente de maintenir ses possessions, tout en donnant une cohésion à un territoire de plus en plus vaste, le tout en créant des alliances stratégiques, ou en plaçant des seigneurs sur qui il a un peu d’emprise dans des endroits choisis. On voit combien l’exercice est délicat, et c’est passionnant !
Il faut aussi signaler que ce tome est aussi celui qui s’éloigne le plus de la réalité historique, pour proposer une intrigue toute romanesque. L’auteur rétablit les vérités dans sa postface, et s’explique sur les choix narratifs très plausibles qu’il a fait, ce qui s’avère hautement appréciable.
Malgré quelques réserves, voilà un roman historique qui sait embarquer par son rythme, et son convaincant mélange entre faits documentés et épisodes clairement romancés. A tel point qu’on attend même la suite de pied ferme, en espérant qu’elle soit traduite !
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