SCIENCE-FICTION — Je suis toujours enthousiaste et curieuse lorsqu’on me met un roman de Veronica Roth entre les mains. En son temps, avant l’adaptation cinéma, Divergent, acheté presque au pif dans un Barnes & Noble de Baton Rouge, m’a enchantée. Mais Marquer les ombres, sa deuxième série, ne m’avait pas convaincue. Qu’en est-il des Élus ?
Ce qui change drastiquement d’avec les deux séries pré-citées, c’est qu’il s’agit-là d’un roman adulte. Les héros tutoient la trentaine, ils ont un bagage plus important que Tris ou Four, ils n’ont ni les mêmes hésitations, ni les mêmes préoccupations. Ça change des éternels adolescents qui sauvent le monde… et c’est d’autant plus intéressant qu’il s’agit justement là d’ex-ados sauveurs du monde : Veronica Roth s’intéresse à cinq individus qui ont combattu un grand méchant pendant leur adolescence dix ans auparavant.
La première partie du roman pose donc la question très souvent inexistante du « et après ? ». Que devient-on quand on a sauvé la planète, après le mot « fin » au générique ? Ce n’est pas forcément très reluisant puisque l’héroïne, Sloane, souffre clairement d’un syndrome de stress post-traumatique. Imaginez si on vous montrait vos héros préférés dix ans après, souffrant d’insomnie et de terreurs nocturnes, obligés de se gaver de Valium ? Ce début de roman est donc particulièrement amer, car au-delà du traumatisme, Sloane n’aime clairement pas sa vie : après avoir été une des « élues » et avoir débarrassé le monde de l’Obscur, Sloane ne rêverait que d’une chose, retourner à l’anonymat, qu’on lui foute la paix, en gros. Or, là voilà, comme ses comparses devenue une célébrité avec tout ce que cela entraîne : les articles insultants, les paparazzis, l’impossibilité de sortir sans se faire repérer aussitôt, l’impression permanente d’être jugée par tout le monde… Comme dans The Effigies de Sarah Raughley, les sauveurs du monde sont des stars comme les autres, avec contrats de pub et inauguration de lieux publics à la clé… C’est un brin cynique mais intéressant et pertinent.
La deuxième partie fait brusquement sortir l’intrigue de ses rails puisque nos héros sont brutalement sortis de leur quotidien pour une nouvelle mission de sauvetage. Mais il n’est pas aisé de reconstituer une équipe après dix ans de calme, après le ressentiment et l’amertume. Veronica Roth m’a surprise avec cette direction donnée au roman, puisqu’elle joue avec un des concepts de SF les plus féconds qui soient… mais je ne vous en dirai pas plus pour ne pas déflorer l’intrigue.
Au final, qu’en avons-nous pensé ? J’ai aimé la mise en abîme de la première partie, j’aime les romans qui arrivent à avoir une réflexion critique sur leur propre genre, et là, c’était le cas. Les parties suivantes ne manquaient pas d’attrait, il y avait de l’action et des retournements de situation dans un contexte SF plutôt original, mais on retombait tout de même dans quelque chose de plus classique… Je dirais donc que c’était moins bien que Divergent et mille fois mieux que Marquer les ombres, c’est pas mal non ?
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