THRILLER HISTORIQUE — La ville de New York ne s’est pas toujours appelée New York : à une époque lointaine, on l’appelait New Amsterdam ! Et c’est dans l’ancienne colonie hollandaise que Jean Zimmerman nous transporte avec son roman Le Maître des orphelins.
C’est la joie de découvrir Manhattan dans les années 1660, couplé à un excellent souvenir d’un roman précédent de l’autrice (La Petite Sauvage, qui se passait également à Manhattan mais quelques deux cents ans plus tard), qui m’a poussée à entamer ce roman en dépit du thème éminemment violent du récit : la balade dans cet antique Manhattan n’a rien d’une promenade de santé, bien au contraire. Si vous êtes de ceux qui réclament des « trigger warnings » au début du récit, en voilà quelques uns : meurtres d’enfant, cannibalisme, viol, torture…
Oui, tout ça : le récit n’a absolument rien de tendre, si ce n’est l’idylle un peu parachutée entre les deux personnages principaux, une jeune marchande hollandaise féministe avant l’heure et un espion britannique séduisant. Alliance improbable, mais qui fonctionne plutôt bien. Tous deux enquêtent sur des disparitions d’enfants : certains d’entre eux sont retrouvés, morts et partiellement dévorés. Sur Manhattan semble régner l’ombre du Witika, un monstre mythique amérindien féru d’enfants…
Le roman entraîne le lecteur aux confins de la folie, évoque les plus effroyables tabous et décrit des scènes qui font froid dans le dos : fort heureusement, le ton est relativement détaché, et même moi qui suis sensible, j’ai réussi à prendre de la hauteur en me répétant en boucle « ce n’est que de la fiction ! ». Cependant, inutile de le nier : le contenu est très rude. D’un point de vue historique, l’autrice prend la peine de contextualiser la vie de la colonie, et c’est très appréciable. Elle rappelle ainsi ce qui se passe en Angleterre (la restauration de Charles II), évoque en passant notre Louis XIV et se penche abondamment, bien sûr, sur les tensions entre Hollandais et Britanniques, New Amsterdam s’apprêtant à devenir New York. La dynamique tendue entre les différentes colonies du continent américain et les différentes factions qui y exercent leur pouvoir est bien rendue, et passionnante.
À qui recommander ce livre ? Aux amateurs d’histoires comme à ceux de thrillers. Si on n’égale pas là La Petite Sauvage, Le Maître des orphelins offre une plongée intéressante dans une facette méconnue de l’histoire de Manhattan, et ça vaut tout de même largement le détour !
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