Timur Vermes s’est lancé dans une entreprise audacieuse et potentiellement polémique en imaginant le réveil en 2011 du plus grand monstre que le XXe siècle ait connu. Le marketing autour du livre est particulièrement efficace : une couverture sobre et épurée, terriblement évocatrice, un prix à 19,33€ comme un odieux clin d’œil à l’année où l’Allemagne a basculé. Voilà un livre qui devrait faire fureur…
L’ex Führer justement se réveille dans un terrain vague de Berlin, persuadé d’être en 1945, dans son bunker, sur le point de perdre la deuxième guerre mondiale. Il se découvre à la place dans l’Allemagne de 2011, menée d’une main de fer par Angela Merkel (une femme !). A l’ancien tyran de se faire à ce monde étrange où l’Allemagne n’est plus qu’un pays européen parmi les autres, où le salut nazi s’est perdu, où tout le monde porte aux nues un certain Internet…Rapidement, il attire l’attention des médias, et devient une star du petit écran et de Youtube. Sous l’humour un peu limite se cache en fait une violente diatribe nazie…
Ce retour est pour le moins dérangeant. Personne ne pense avoir le vrai Hitler face à lui : on pense à un imitateur particulièrement épris du rôle, et totalement dévoué à son « art ». Malgré cela, personne ne semble longtemps mal à l’aise face à une prestation si réaliste. On pourrait penser qu’un type ressemblant comme deux gouttes d’eau à Hitler se pavanant dans les rues en uniforme nazi se ferait lyncher ou tout du moins copieusement insulter. Mais dans le roman de Timur Vermes, les badauds semblent plutôt impressionnés, et trouvent ça plutôt « génial ». Le quiproquo se poursuit, non sans humour. A une femme qui demande à Hitler s’il a subi des opérations (sous-entendu, pour ressembler autant au célèbre monstre), celui-ci ne comprend pas et s’exclame : « mais bien sûr qu’il y en a eu, l’opération Barbarossa… ». Et ainsi de suite…
Un Hitler confronté à l’Allemagne de 2011, à l’union européenne, à l’euro, à la télévision, à l’internet, en somme, à toutes les spécificités de notre époque entraîne des scènes que l’on s’en veut de trouver comiques. Timur Vermes a choisi une narration à la première personne du singulier, ce qui rend son personnage plus humain, une sensation vraiment étrange. Cependant, il nous est toujours aussi odieux ! On ne peut s’empêcher de grincer sérieusement des dents.
La machine médiatique s’emballe, et Hitler fait les gros titres, divisant les esprits : certains l’adorent, le trouvant à mourir de rire, d’autres le haïssent, et on comprend bien pourquoi. Si au début il est clair pour tout le monde que c’est un imitateur plus doué que les autres, peu à peu les gens commencent à s’adresser à lui comme s’il était vraiment Hitler, ce qui finalement ne semble plus vraiment les gêner. C’est tout de même l’occasion pour Timur Vermes d’écrire une satire mordante sur les médias, prêts à adouber n’importe qui, tant qu’il y a de l’argent à la clef et avides de scandales et d’émissions bébêtes (la première rencontre d’Hitler avec un poste de télévision moderne inclut une émission façon Tellement vrai qui apparaît par le prisme de son regard encore plus ridicule). Il montre également à quel point les gens semblent avoir la mémoire courte. C’est un constat véritablement effrayant. Et si le contexte de crise devenait aussi critique qu’en 1933, un dictateur aussi terrible pourrait-il revenir sur le devant de la scène ? Timur Vermes interroge, et montre que derrière la comédie, une vraie réflexion se cache…
Une lecture intéressante qui met certes mal à l’aise, mais qui fait réfléchir.
Il est de retour, Timur Vermes. Belfond, mai 2014.
J’ai eu beaucoup de mal avec ce livre, peut-être que j’en attendais trop . J’ai trouvé que c’était répétitif, même si le message reste important cette lecture m’a déçu