La collection Grain de Sable, aux éditions du Père Fouettard, a choisi un concept aussi original qu’innovant, en partant d’un simple constat : l’histoire est souvent racontée par les vainqueurs.
Avec des ouvrages recto-verso présentant deux versions d’un même récit, conté par deux personnages, la collection Grain de Sable fait dérailler les rouages du prêt-à-penser !
C’est l’histoire de Radegonde, une petite fille qui vit dans un village ensoleillé. Mais lorsqu’il pleut, tout le monde est terrifié. Car la Grand’Goule sort des égouts, rôde en ville et croque des gens en guise de dîner. La ville est terrifiée. Radegonde a de la suite dans les idées : si personne n’est capable de s’occuper du problème, c’est par la ruse – et le poison – qu’elle vaincra le dragon. La voilà partie en guerre !
C’est aussi l’histoire d’un dragon. Un dragon qui, décidément, préférait les temps jadis. Avant que les hommes n’exterminent les siens. Depuis, le dragon, qui a porté bien des noms, se cache, puisque les hommes aimeraient bien le découper pour faire de son cuir des armures, ou de son cœur des potions magiques. D’ailleurs, ils s’imaginent même qu’un dragon mange des enfants. Ridicule ! Et, justement, voilà une petite fille fort jolie qui entre dans la tanière. Avec des gâteaux ! La vie va, peut-être, enfin changer !
Radegonde et la Grand’Goule est un album des plus originaux. On lit tout d’abord l’histoire de la fillette et, hop, on passe dans la foulée à celle du dragon, ce qui permet d’avoir deux sons de cloche à la même aventure. D’un côté, une quête héroïque dans laquelle une petite fille accomplit un geste permettant de sauver sa ville. De l’autre, un message plein d’espoir d’un être pourchassé sans raison. Évidemment, les deux versions se rejoignent au milieu. Et, si la partie de Radegonde colle tout à fait aux traditionnels contes pour enfants, dans lesquels on occis le dragon, la seconde partie, elle, est nettement plus sensible. Celle-ci vient nuancer la première et poser des questions on ne peut plus pertinentes : le vainqueur a-t-il toujours raison ? Exterminer les dragons était-il vraiment une question urgente et prioritaire ? S’est-on réellement posé les bonnes questions ? Car il ne faut pas longtemps pour discerner la terrible incompréhension entre humains et dragons, source de tant de malheurs de part et d’autre.
Avec Naïma au texte, Anne Mahler au dessin, on a un album vif, pétillant, très coloré. En un mot : énergique ! Les couleurs éclatantes soulignent la détermination de Radegonde, d’un côté, l’espoir de la Grand’Goule de l’autre.
Ainsi, Radegonde et la Grand’Goule appelle à une meilleure entente entre personnes et pousse à s’interroger sur les notions de bien et de mal. C’est fin et la réflexion est brillamment amenée ! Un album à mettre entre toutes les mains et qui soutiendra parfaitement les enseignants en recherche de supports pour les leçons d’éducation civique.
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