ROMAN ADO — Quand on vous décrit le pitch des Cartographes, on ressent un léger moment de flottement. « Vraiment ? C’est bien ce que j’ai compris ? » Sans nul doute, l’auteur a été des plus audacieux, en imaginant un « Grand Bouleversement » qui a séparé certaines grandes zones géographiques de manière temporelle. Oui, vous avez bien lu. Si la côte Est des Etats-Unis se situe en 1891, le Canada est lui revenu à la préhistoire, l’Angleterre est en pleine Renaissance, et l’Egypte est de retour à l’ère des pharaons. Idée fascinante, n’est-il pas ? Et plutôt difficile à appréhender avant de commencer l’excellent premier tome de cette série à suivre…
Rassurez-vous, tout devient plus clair à la lecture. Sophia, treize ans, vit dans ce que l’on appelle désormais le « Nouvel-Occident », à Boston tout particulièrement. Ses parents ont autrefois disparus en pleine exploration : depuis, elle est élevée par son oncle, le grand cartographe Shadrack Elli. Alors que tous deux s’apprêtent à partir à la recherche des parents de Sophia dans un contexte politique très tendu (où il est question de fermetures de frontières, un thème ô combien tristement actuel), Shadrack est brutalement enlevé. Sophia se lance alors dans une quête dangereuse : trouver Veressa. A ses côtés, Théo, un garçon débrouillard qui s’est enfui d’un cirque…
Les Cartographes est de ces romans qui nous emportent en quelques pages : on y trouve tout ce qui fait un bon roman jeunesse épique. Un monde mystérieux à découvrir, une fuite éperdue, une quête pleine de rebondissements, des méchants très méchants… et une héroïne qui va apprendre beaucoup en chemin, accompagnée d’un sidekick attachant !
L’univers imaginé par S. E. Grove, dépourvu d’unité temporelle, est passionnant : on ne peut que déplorer n’en avoir vu qu’une toute petite partie, même si on se doute bien que les tomes suivants nous permettront d’explorer de nouveaux âges ! S. E. Grove arrive à se jouer avec talent des paradoxes et autres situations compliquées entraînés par l’idée d’un monde aux époques différentes. Mieux : il joue avec les nombreuses possibilités de ce ressort de l’intrigue, notamment en donnant une grande importance à la cartographie, qui sert certes à répertorier les lieux et leur topographie, mais également le passé de chaque endroit ! Les cartes peuvent être de supports variés, et montrer bien plus de choses que nos bêtes GPS modernes. Bien évidemment, avec un titre pareil, Les Cartographes, cet art singulier ne pouvait être qu’au centre de l’intrigue : se dévoile en filigrane l’idée d’une « carta mayor« , qui retranscrirait le monde entier, son passé… et son futur. Chaque petite chose qui s’est produite un jour y serait consignée. Fascinant, non ?
Au fil de ses aventures rondement menées, Sophia va bien évidemment mûrir, et apprendre de très nombreuses choses sur les activités de son oncle (un personnage bienveillant très attachant, dont on soupçonne qu’il a encore beaucoup à nous apprendre). A ses côtés, Théo, un garçon plein de ressources que le hasard a placé sur son chemin. Nos deux héros forment une fine équipe, et S. E. Grove fait de leur relation, entre méfiance et complicité, un des atouts du roman. D’autres personnages fort sympathiques croiseront leur chemin, à l’instar d’un duo de pirates très chouette, ou encore d’un botaniste à l’âme d’aventurier !
Ce roman, disons-le tout net, a eu le mérite de nous faire retomber en enfance : nous l’avons découvert avec le même enthousiasme que Les Royaumes du Nord il y a désormais quinze ans, à titre de comparaison. Il nous a fait voyager, et rêver, et pour cela, merci Nathan de nous avoir permis de découvrir ce premier volume très prometteur !
Les Cartographes : La Sentence de verre, S. E. Grove. Nathan, octobre 2015. Traduit de l’anglais par Sophie Dabat.
Je viens de le recevoir… Autant dire qu’il me TARDE de le lire. Et que ce craquage est entièrement de ta faute, évidemment ! ❤️
Mea culpa !
J’avais loupé cet article, heureusement que je suis tombée dessus aujourd’hui! Ce livre semble passionnant. Il risque bien de finir au sommet de ma PAL. Merci pour cette magnifique chronique.
Merci 🙂