Etes-vous parisien ? Si oui, le constat suivant ne sera pas vraiment une surprise pour vous : les gens dans le métro sont des sauvages à peine civilisés qui, quand ils n’écoutent pas leur musique à fond ou téléphonent en hurlant dans leur smartphone, vous bousculent, vous marchent sur les pieds, ou restent en plein milieu du chemin, vous empêchant de sortir de la rame. Et tel un redresseur de tord, Germain, bègue, célibataire, caissier, bouscule en retour. La vie du garçon n’est pas rose, et maltraiter les malotrus du métro le défoule. Ainsi, il oublie son métier où il s’ennuie, et où heureusement, un panneau le présentant comme muet le dispense de faire laborieusement la conversation aux clients. Il oublie qu’il est amoureux en secret de Clotilde, son orthophoniste, très jolie mais très peu efficace. Et enfin, il oublie son bégaiement, qui lui empoisonne la vie depuis sa naissance (ou presque).
Un jour, alors que Germain prend le métro de manière tout à fait sage pour une fois, pour cause de présence paternelle, il repère une étrange jeune femme qui, comme lui, scanne la foule et bouscule discrètement les gens. Elle écrase même le pied de son père, qui a le mauvais goût d’être assis sur le strapontin alors que la rame est bondée. Germain n’aura de cesse de la retrouver. Il découvrira alors qu’il n’est pas le seul à malmener les usagers indélicats.
Vincent Maston a écrit un roman simple et sans prétention, aux personnages attachants qui, à partir d’une trame gentillette de prime abord, dévie progressivement vers un dénouement plus inattendu. Germain est un protagoniste comme on les aime : le garçon ne part pas gagnant dans la vie, et est empli d’une colère sourde. Qui ne serait pas furieux à sa place ? Germain est le garçon qui laisse les autres apitoyés, tant il cumule les tares : outre son bégaiement, le jeune homme avoue être doté d’un sens de l’esthétisme plus que douteux et de goûts musicaux obscurs, et il est très timide. Bousculer les gens, c’est l’acte de transgression soft, c’est l’acte du justicier qui rétablit l’équilibre. Certains vont en boîte ou font du sport pour évacuer le stress. Germain, lui, a un passe-temps peu commun. Jusqu’à ce qu’il réalise qu’il n’est pas seul. Non, Germain, tu n’es pas seul ! Il existe une confrérie des pousseurs du métro. On ne vous dit pas ce qui se passe quand Germain rejoint ce groupe, mais on vous dira tout de même qu’il y a de l’action.
Germain dans le métro est un premier roman honnête et plaisant, qui nous fait réfléchir mine de rien à notre comportement parfois inhumain et très souvent irrespectueux dans les transports en commun. Vincent Maston décrit avec une précision d’anthropologue les comportements dans le métro, ces gens qui feignent d’être trop absorbé par leur lecture pour remarquer la femme enceinte debout près d’eux, qui laissent leur sac sur le siège à côté d’eux, qui ne laissent pas sortir les autres, plantés tels qu’ils sont devant les portes. Après une telle lecture, c’est certain, on fera davantage attention. Qui sait si des pousseurs ne rôdent pas réellement dans le métro…
Germain dans le métro, Vincent Maston. Jean-Claude Lattès, février 2013.
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