Victoria et les Staveney, actuellement au cinéma !

Doris Lessing est une grande dame de la littérature : son oeuvre a été récompensée par le prix Nobel en 2007 et elle fait de nouveau l’actualité en ce début d’année, car son roman Victoria et les Staveney vient d’être adapté au cinéma sous le titre Mon amie Victoria (sortie en salles le 31 décembre).

Victoria est une petite Londonienne noire qui n’a pas eu vraiment de chance dans la vie jusque là. Confiée à la garde de sa tante très malade après la mort de sa mère, Victoria a grandi dans la pauvreté et n’en croit pas ses yeux quand elle est conviée dans l’univers luxueux des Staveney, une riche famille blanche. Sa tante hospitalisée, Victoria est hébergée le temps d’une nuit par cette famille bourgeoise. A neuf ans, Victoria découvre un monde à l’opposé de celui qu’elle connaît, s’étonnant de trouver des pièces suffisamment grandes pour loger plusieurs familles, et tellement de jouets qu’on se croirait dans un magasin. Cette nuit, Victoria ne l’oubliera jamais.

Bien des années plus tard, Victoria est devenue une belle jeune femme. Son chemin croise celui de Thomas, le fils cadet des Staveney. Ils passent un été enfiévré, au terme duquel Victoria se découvre enceinte. Elle attendra sept années avant de présenter Mary aux Staveney… avec des conséquences pour le moins imprévues.

Victoria et les Staveney

Roman féroce sur les inégalités et le racisme, Victoria et les Staveney est un récit court qui n’en est que plus percutant. Victoria est cruellement consciente du fossé qui existe entre sa vie et celle des Staveney, qui n’évoluent tout simplement pas dans le même monde. Même si les Staveney se targuent de faire preuve de tolérance, et d’ouverture d’esprit, leur solitude reste teintée d’une condescendance indélébile. Victoria sait qu’en introduisant sa fille dans ce monde privilégié, elle lui donnera probablement de meilleures armes pour affronter le monde, mais que, se faisant, elle perdra probablement son enfant en chemin. Le désarroi de cette jeune mère démunie est touchant et parfaitement rendu en quelques pages seulement par Doris Lessing.

Il ne faut en effet que peu de mots à Doris Lessing pour exprimer ce qu’elle souhaite : son style est simple, clair, et va droit au fait. Ne versant jamais dans le cliché ou la surenchère, elle dresse un constat terrible et pourtant banal, en montrant un monde clivé et gangrené par les inégalités. Toute méritante qu’elle soit, Victoria peine à s’en sortir. Frappée par les deuils successifs, la jeune fille, bien qu’intelligente, ne peut faire d’études, car il faut (sur)vivre tout simplement. Elle tombe alors dans un schéma bien éprouvé dans son entourage, celui de la fille-mère. Cependant, tout n’est pas sombre dans l’histoire de Victoria : quelques belles scènes de solidarité émaillent le récit.

Avec Victoria et les Staveney, Doris Lessing ne se perd pas en phrases inutiles : il va droit où elle souhaite mener son lecteur. Un roman dont il est difficile de sortir indemne.

Victoria et les Staveney, Doris Lessing. J’ai lu (nouvelle édition), 2014. Traduit de l’anglais par Philippe Giraudon.

Par Emily Vaquié

A propos Emily Costecalde 1036 Articles
Emily est tombée dans le chaudron de la littérature quand elle était toute petite. Travaillant actuellement dans le monde du livre, elle est tout particulièrement férue de littérature américaine.

1 Commentaire

  1. Je n’ai qu’un souvenir (malheureux) de ma rencontre avec la plume de Doris Lessing mais celui ci m’intrigue beaucoup. Il va peut être me réconcilier avec l’auteur 😉

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