ROMAN D’APPRENTISSAGE — Transparence est de ces romans sur lesquels il est difficile de ne pas s’arrêter en librairie : sa couverture, à la typographie malicieuse, au bleu dynamique et aux reflets très esthétiques, est un véritable appel à la lecture. Mais quid du contenu ?
« Glass » signifie « verre » en anglais. Avec un nom pareil, le jeune Günter Glass était prédestiné à travailler le verre. Fasciné par cette matière découverte au hasard d’un musée, un jour où son père l’y avait laissé pour aller travailler, Günter devient laveur de vitres et monte sa propre petite entreprise. Appliqué, consciencieux, le jeune homme se fait bien vite remarquer par John Blades, magnat du lave-glace, qui lui propose une mission importante dans la capitale.
Günter quitte donc sa province pour la grande ville, Londres en l’occurrence. Loin de chez lui, le jeune homme va devoir apprendre à mener une vie adulte : se trouver un appartement, devoir contenter un patron exigeant aux idées étroites, et, pourquoi pas, peut-être nouer une relation amoureuse.
Voilà notre Candide anglais parti dans le vaste monde : notre héros, franc et naïf, va se heurter à cette nouvelle vie…
Roman d’apprentissage assez impitoyable, Transparence nous montre comme un garçon essaie de surmonter le deuil de sa mère, et de prendre sa vie en main, ce qui n’a rien de simple, même sur le papier. Volontaire, Günter n’hésite pas à se lancer dans l’aventure de autoentrepreneuriat, mais avec tellement de naïveté (en témoigne une conversation édifiante avec les impôts, où le lecteur comprend que Günter n’a bien sûr pas déclaré son statut) qu’on est presque soulagé pour lui lorsque John Blades lui propose un emploi sous son égide.
Soulagement de bien courte durée ! Car John Blades, sous des dehors charmants, se révèle xénophobe, voire fasciste. Günter se retrouve bien désemparé face aux tirades choquantes de son patron, qui l’apprécie tout particulièrement du fait de son ascendance germanique ! Cela entraîne forcément des situations décalées…
Décalé, Günter l’est également. La comparaison au Candide de Voltaire n’est pas anodine. Comme lui, Günter découvre le monde avec un léger grain de folie, et beaucoup d’humanité. Il est résolument attachant, et Alex Christofi a réussi l’exploit de ne jamais le rendre ridicule, même lorsqu’il nous montre la passion un peu fofolle de Günter pour les gaufres ou les situations loufoques dans lesquelles il se retrouve souvent plongé. Autour de lui gravitent des personnages tout aussi joyeusement barrés, à l’instar de son colocataire londonien, absorbé dans une tâche titanesque qui le rend totalement asocial…
Transparence est donc un roman vraiment chouette, bien que parfois terriblement triste. Certaines scènes traitant du deuil et de la mort sonnent terriblement justes et transmettent à merveille l’émotion souhaitée. A d’autres moments, en revanche, les péripéties de ce héros pas comme les autres nous font sourire… Avec Transparence, le lecteur passe par toute une gamme d’émotions… Alex Christofi est donc un auteur que l’on suivra de près !
Transparence, Alex Christofi. Fleuve éditions, 2015. Traduit de l’anglais par Nathalie Peronny.
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