ROMAN POST-APOCALYPTIQUE — Imaginez : vous vivez dans un monde post-apocalyptique et vous n’avez jamais vu la lumière du jour, car vous avez toujours vécu dans des tunnels, persuadé que l’air du dehors est toxique. Imaginez : vous vivez dans un monde où l’espérance de vie ne dépasse que très rarement les vingt-cinq ans. Imaginez : vous vivez dans un monde où, à quinze ans, on vous attribue un rôle qui va conditionner le reste de votre vie : ouvrier, chasseur ou géniteur.
C’est dans ce monde qu’a grandi Trèfle, quinze ans, fraîchement nommée chasseuse. Elle n’a jamais remis en cause le mode de vie de ses congénères et prend pour argent comptant tout ce que les « anciens » lui disent… jusqu’à sa rencontre avec Del, son partenaire de chasse. Del n’a pas grandi dans l’enclave : on l’a trouvé errant dans les couloirs quelques années auparavant. Auprès de Del, la jeune fille va progressivement apprendre à poser des questions, et à se demander ce qui se cache « au dessus ».
Enclave nous plonge dans un univers décimé par des armes biologiques et bactériologiques : nous ignorons combien de temps a passé depuis la catastrophe. Trèfle, elle, n’a connu que cette vie précaire, où la moindre maladie peut décimer une communauté, où la faim fait partie du quotidien. Elle vit dans le noir, dans une enclave nommée « Collège », cernée ce qu’elle appelle des « monstres », des mutants carnivores qui hantent le sous-sol. C’est un personnage qui connaît une véritable évolution, salutaire, au fil du roman : de la jeune fille obéissante qui ne savait pas penser par elle-même à la jeune femme combative et curieuse, nous la suivons dans le noir, puis en pleine lumière. Car, vous l’aurez compris, les aventures de Trèfle vont rapidement l’entraîner à la surface : et c’est tant mieux, car c’est à partir de ce moment que l’histoire prend véritablement son essor !
Ann Aguirre a réussi l’exploit de construire un monde post-apocalyptique vraiment complet et intéressant, en brossant rapidement le quotidien de plusieurs communautés, des habitants des enclaves souterraines aux gangs qui sillonnent la surface, en passant par les Fouisseurs… Les problématiques de tout monde post-apocalyptique qui se respecte sont bien évidemment présentes : quête de nourriture, d’eau, de médicaments… ainsi que la question de la reproduction, traitée de manière différente selon les communautés rencontrées. Trèfle observera des choses bien difficiles au fil de son périple aux côtés de Del… Pour survivre dans le monde d’Enclave, il faut en effet une bonne dose de pragmatisme. C’est montré assez bien dans le récit d’Ann Aguirre : les personnages pensent stratégie, et jaugent leurs compagnons de voyage afin de savoir si leur présence les aidera à survivre au nom. Même s’ils ont un cœur, et se montrent sensibles, ils savent faire des choix difficiles. Cela contribue à faire d’Enclave un récit plus réaliste et plus cohérent que certains de ses concurrents, même s’il lui manque le petit plus qui en aurait fait une histoire inoubliable.
Soyez le premier à commenter