Brooklyn, un film qui réchauffe le coeur

CINÉMA — Brooklyn est un drame historique britannico-irlando-canadien réalisé par John Crowley. Dans les années 50, attirée par la promesse d’un avenir meilleur, la jeune Eilis Lacey quitte son Irlande natale et sa famille pour tenter sa chance de l’autre côté de l’Atlantique. The American Dream lui tend les bras ! À New York, sa rencontre avec un jeune homme lui fait vite oublier le mal du pays. Mais lorsque son passé vient troubler son nouveau bonheur, Eilis se retrouve écartelée entre deux pays… et entre deux hommes.

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Il n’est pas rare de voir des films sur les immigrants qui débarquent en Amérique et tout particulièrement sur les expériences des Irlandais et des Italiens à New York. Avec Brooklyn, John Crowley aborde le sujet de la famille d’une manière originale et très délicate. Il est l’antithèse de tous ces films dans lesquels les nouveaux arrivants rivalisent pour la domination des rues avec leurs gangs. Par la même occasion, le film célèbre l’optimisme de la vie américaine lorsqu’on vient de débarquer des rêves plein la tête, tout en restant sensible à la nostalgie qu’ils ressentent pour le pays et la famille qu’ils ont laissé derrière eux.

Saoirse Ronan, nominée pour le titre tant convoité de meilleure actrice aux Oscars, nous livre une performance remarquable dans le rôle d’Eilis Lacey, une jeune femme qui quitte sa petite ville d’Irlande pour New York. Dans son périple, notre héroïne va évoluer. La gamine innocente et farouche des premières scènes va laisser place à une femme confiante et glamour. Elle porte maintenant des lunettes de soleil à la mode américaine, mange de la barbe à papa avec son amoureux à Coney Island comme des milliers d’autres jeunes Américaines. Elle se comporte dorénavant comme si elle était née sur ce nouveau continent, comme si elle savait exactement où elle va.

Saoirse Ronan capture brillamment ce mélange étrange de caractère et de vulnérabilité. Elle parvient même à maintenir sa dignité en vomissant dans un seau d’incendie au cours d’une traversée de l’Atlantique par temps orageux. Dès le début du film, John Crowley incorpore fréquemment des gros plans sur son visage si particulier.

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Le scénario de Nick Hornby, adapté du roman de Colm Tóibín (disponible en grand format chez Robert Laffont et en poche chez 10/18), met en lumière l’amour, la loyauté et l’identité nationale. La petite ville d’Irlande que Eilis laisse derrière elle ne peut proposer à ses jeunes qu’un horizon bouché, sans perspective d’emploi. Il n’y a rien pour elle ici. Elle avait un emploi à temps partiel mal payé dans un magasin d’épicerie gérée par l’acariâtre Miss Kelly (Bríd Brennan), qui se contente de vendre du pain rassis et prend plaisir à humilier son personnel devant les clients. Quand l’occasion de quitter l’Irlande pour une vie meilleure se présente, la sœur d’Eilis, Rose (Fiona Glascott) et sa mère feront tout pour l’en dissuader. New York semble être pour elles une ville aussi lointaine qu’étrange, comme une autre planète où il fait trop chaud en été et trop froid en hiver.

Crowley dirige parfaitement ses acteurs. Lorsque Eilis est à bord du navire pour New York, il n’y a pas besoin de longs dialogues pour ressentir ses émotions. Les sentiments se lisent sur son visage.  La douleur de la séparation et le mal du pays vont laisser place à la joie de vivre, à une liberté inédite. Eilis reprend le dessus plus rapidement qu’elle ne l’aurait pensé. Et pour cause, le Brooklyn qu’Eilis rencontre n’est pas si différent de l’Irlande. La pension où elle vit est comme une terre d’accueil, présidée par la caustique, mais néanmoins très drôle Mme Kehoe (Julie Walters). Avec ses autres amies, également des femmes seules en terre inconnue, Eilis va reprendre goût à la vie. Son contact principal, le Père Flood (Jim Broadbent), un prêtre irlandais, va également l’aider en lui trouvant un travail au sein d’une grande enseigne. La vie change alors pour notre immigrée, qui commence à porter du rouge à lèvre et du mascara : une vraie femme fatale en devenir ! Les couleurs du début du film s’égayent. Un amour nait entre Eilis et un plombier italo-américain du nom de Tony (Emory Cohen), dépeint de façon douce et comique. Pour s’en sortir, Eilis prend des cours du soir pour améliorer son cadre de vie tout en travaillant le jour comme assistante d’une grande enseigne. Elle construit des projets. Les complications arrivent quand Eilis, avec son air new-yorkais et sa nouvelle confiance en elle, doit retourner en Irlande. Le lieu qui semblait si oppressant quand elle l’a quitté est transformé. Avec son optimisme retrouvé, elle commence à voir les bons cotés de son pays natal. Même les hommes irlandais jouant au rugby apparaissent plus attrayants pour elle. Le jeune Jim (Domhnall Gleeson) ne la laissera pas indifférente.

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Brooklyn est comme un bijou dans son écrin, très fragile et pourtant fort à la fois. Le film suscite des sentiments complexes et contradictoires. Eilis garde des secrets qu’elle ne devrait pas. Sa loyauté envers sa famille et son amoureux resté à New York sont en conflit. On trouve dans Brooklyn une élégance modeste et un charme désuet qui en font une oeuvre intemporelle, servi par une écriture fluide et une interprétation de qualité, toujours dans un registre humble et tendre. Soirse Ronan s’y révèle bouleversante, le coeur entre les deux continents.

L’actrice Saoirse Ronan s’est sentie particulièrement impliquée émotionnellement dans l’interprétation de la jeune Eilis Lacey, une femme déchirée entre deux hommes et deux pays. En effet, née à New York de parents irlandais et élevée dans la banlieue de Dublin, elle est elle-même issue de deux cultures: « C’est une histoire près de mon cœur parce qu’elle parle de ma famille. C’est le voyage que mes parents ont fait dans les années 1980, ils ont déménagé à New York et ils ont vécu le même genre de situations, même si c’était à une époque et une ère différente« .

Avec ses couleurs vives et son empathie pour les personnages, Brooklyn exhale un parfum de pureté et de générosité qui ne fera pas fondre seulement les spectateurs les plus romantiques. Certes un récit sans aucune surprise, le film s’avère porteur d’une certaine légèreté qui fait du bien et qui à mon sens mérite ses nombreuses récompenses et nominations.

A propos Kévin Costecalde 303 Articles
Passionné par la photographie et les médias, Kévin est chef de projet communication. En 2012, il a lancé le blog La Minute de Com, une excellente occasion selon lui d'étudier les réseaux sociaux et l'actualité. Curieux et touche-à-tout, Kévin aime les challenges, les voyages et l'ironie.

3 Commentaires

  1. J’ai très envie de voir ce film magnifique mais avant tout, je voudrais lire le livre. Je préfère découvrir l’histoire et les personnages avec les mots et mettre des images après.
    Merci pour ton avis Kévin.

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