CONTE MAPUCHE — L’année dernière, nous vous parlions de L’Ouzbek muet et autres histoires clandestines, un recueil de nouvelles de Luis Sepúlveda qui nous avait éminemment plu. Cet hiver, ce n’est pas un recueil de nouvelles, mais un conte traditionnel pour petits et grands qu’il publie. Reprenant la tradition orale mapuche, qu’il tient de ses aïeux, Luis Sepúlveda nous raconte l’Histoire d’un chien mapuche.
Afmau, Loyal en français, est un chien de chasse, un chien prisonnier, affamé, maltraité, guide de la bande d’hommes patibulaires lancés à la poursuite d’un Indien blessé, dans la forêt d’Araucanie. Le flair de Loyal sait repérer la peur et la colère dans l’odeur de ces brutes sanguinaires. Mais il a également retrouvé la piste du fugitif et dans cette piste, l’odeur des bonnes choses d’autrefois, comme celle d’Aukamañ, son frère-homme, le petit garçon qui l’a recueilli, aimé, et auprès duquel il a grandi dans le village mapuche de ses jeunes années. Difficile, dès lors, de livrer son ami à ses maîtres…
Le talent de conteur de Luis Sepulveda n’est plus à faire et cette Histoire d’un chien mapuche vient le confirmer. Le récit est assez court (moins de 100 pages), abondamment illustré par les très beaux encrages de Joëlle Jolivet, mais il parvient tout de même à créer une bulle dans laquelle se plonge le lecteur, envoûté par l’atmosphère de la forêt d’Araucanie et les émotions qui traversent le texte. Celui-ci est d’ailleurs émaillés de mots en mapudungun, la langue des Indiens mapuche, ce qui contribue à renforcer l’atmosphère bien particulière de l’histoire, comme la poésie des mots.
Mais sous cette histoire qui célèbre la fidélité, l’amitié et, bien sûr, la Nature, perce la cruelle réalité : le chien a été enlevé, battu, affamé, terrorisé. Les Indiens spoliés, maltraités et subissent encore et toujours la persécution. Sous la beauté des mots perce l’histoire de l’Araucanie et le constat n’est guère brillant.
Mais tout cela s’équilibre avec l’espoir et la bienveillance que véhiculent Aukamañ et Afmau, qui redonnent foi en l’humain, l’animal et en la nature.
Luis Sepúlveda signe un conte très humaniste, qui célèbre les Mapuches, la nature, la fidélité et l’amitié : à mettre, donc, entre toutes les mains !
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