L’Assassin du train : entre fiction et réalité

POLAR – Vous avez peut-être déjà entendu parler des sœurs Mitford, 6 jeunes filles issues de la noblesse britannique aux destins plutôt sulfureux. Nées entre 1904 et 1920, leurs frasques et leurs vies sont le reflet de ce qu’a pu être l’Histoire du XXe siècle. Et ce sont elles – et en particulier Nancy, l’aînée – que Jessica Fellowes (écrivaine et journaliste, elle est aussi conférencière spécialiste de Downton Abbey) a choisi de mettre en lumière dans son roman, en les mettant en scène de manière fictive dans une enquête basée elle aussi sur un fait réel non élucidé. Alors, bonne ou mauvaise idée que de faire se rencontrer ces deux histoires ?

1919. Louisa Cannon rêve d’échapper à sa vie misérable à Londres, mais surtout à son oncle, un homme dangereux, prêt à la prostituer pour se faire un peu d’argent. Par miracle, on lui propose un emploi de domestique au service de la famille Mitford qui vit à Asthall Manor, dans la campagne de l’Oxfordshire. Là, elle devient bonne d’enfants, chaperon et confidente des soeurs Mitford, en particulier de Nancy, l’aînée, une jeune fille pétillante à l’esprit romanesque qui a le même âge qu’elle. Mais voilà qu’un crime odieux est commis : une infirmière, Florence Nightingale Shore, est assassinée en plein jour à bord d’un train. L’affaire passionne Nancy, qui s’est mis en tête de la résoudre à tout prix et qui pour ce faire, va embarquer Louisa dans son sillage.

Ce roman captivant nous emmène dans l’Angleterre de l’entre-deux-guerres. À travers lui, on découvre le quotidien d’un pays qui se remet à peine des affres de la Première Guerre mondiale, et ce en s’attachant aux pas de deux personnages que tout semble opposer. D’un côté, il y a Louisa, jeune servante d’origine modeste qui vient des milieux défavorisés de Londres. De l’autre, on suit Nancy, une jeune aristocrate effrontée, pleine de verve et de détermination, pour qui la vie est une succession de bals et de frivolités. Elles côtoient des soldats de retour de France, pas tout à fait remis de leur expérience de la guerre et dont les séquelles ne sont pas forcément physiques, ainsi que des policiers, des notaires et tout le gratin de la haute société anglaise des années 20. Un peu à la façon de Downton Abbey (une série bien connue de la famille Fellowes !), on découvre un système de classes sociales encore bien ancré dans les moeurs de l’époque, même s’il ne va pas tarder à s’essouffler.

Ce qui est intéressant, c’est aussi de réaliser que toute l’intrigue est basée sur un meurtre qui a réellement eu lieu et qui n’a jamais été élucidé. À la lecture du livre, impossible de se douter que ce fait divers s’est vraiment déroulé tellement l’histoire colle parfaitement. On apprend d’ailleurs à la fin du texte que l’autrice s’est octroyé quelques arrangements avec la réalité afin de servir au mieux son récit. Le type d’intrigue utilisé n’est d’ailleurs pas sans rappeler les romans d’Agatha Christie : les amateurs du genre devraient donc se régaler !

C’est donc un très bon mélange de faits et de fiction, à la fois ancré dans la réalité et pourtant romancé. On reprochera peut-être les longueurs de ce livre : ce n’est pas tant un problème de nombre de pages, mais l’histoire présente tout de même un manque flagrant de rythme. La mise en place de l’histoire et des (nombreux) personnages est plutôt longue. Ce n’était pas forcément nécessaire d’étirer le récit sur un format aussi grand et un peu de dynamisme supplémentaire n’aurait pas été de refus. On attend quand même la suite et, qui sait, une autre des sœurs Mitford ! Au hasard, Pamela, la deuxième de la fratrie ?

L’Assassin du train, Jessica Fellowes. Livre de Poche, Mai 2019. Traduit de l’anglais (Royaume-Uni ) par Valérie Rosier. 

 

 

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