Hystériques : vous enverrez le ticket de caisse à votre mutuelle !

Hystériques, Sophie Adriansen

ROMAN — Après l’excellent Linea Nigra, j’étais très curieuse de découvrir le nouveau roman de Sophie Adriansen, un récit au titre évocateur : Hystériques. Un adjectif dont la racine vient de notre premier logement à tous : l’utérus. Cet organe, mystérieux et intime, est au centre de cet ouvrage intensément féminin. 

C’est en effet une histoire de femmes que ce roman nous présente. Dans cette famille, il y a 3 sœurs, chacune avec une histoire différente avec son ventre, sa maternité, son rapport à la féminité. L’aînée a vécu un accouchement traumatique sur fond de violences obstétricales. La cadette sent que son ventre, actuellement gravide, lui cache un secret. Enfin, la benjamine se désespère de tomber enceinte. Trois femmes, trois parcours touchants, dans une famille où on verbalise peu, où on ne parle pas de « ces choses-là ». Le non-dit est incarné par la matriarche, effacée pour ne pas dire désagréable, qui s’offusque qu’on puisse parler fausse couche, infertilité, dépression du post-partum. 

Autant de sujets au sujet desquels la parole s’est libérée depuis quelques années, grâce à l’émergence de hashtags féministes sur les réseaux sociaux, et désormais de romans comme ceux de Sophie Adriansen. Plein d’humanité, porté par un style concis et dynamique, aux chapitre courts et percutants, Hystériques est pour moi un coup de cœur, comme un panorama réaliste et émouvant d’une maternité plurielle, aux multiples facettes. Chacune des frangines est attachante à sa manière : chaque lectrice sera attirée par l’une d’entre elles en particulier. Pour moi, ce fut Diane, car j’ai vécu, moins qu’elle il est vrai, un premier accouchement difficile, marqué de zones d’ombres et d’interrogations, avec un post-partum douloureux et compliqué. L’épisiotomie sans consentement, l’extraction instrumentale et la révision utérine ? Je l’ai vécu de première main, heureusement sous le coup d’une péridurale très efficace. Les mots de Sophie Adriansen sonnent rudement justes : c’est une lecture nécessaire. Universelle, même. Du quotidien d’une famille étendue émergent des vérités générales qu’on commence tout juste e évoquer publiquement. La société a été, comme la famille Viéville, longtemps frappée de silence. Aujourd’hui, les langues se dénouent. Et ça fait un bien fou. Linea Nigra, lu pendant la première grossesse, m’avait touchée de plein fouet. Hystériques, lu maintenant que je suis deux fois mères, réitère de plus belle. Alors, merci Sophie ! 

Hystériques, Sophie Adriansen. Charleston, 2021.

A propos Emily Costecalde 1036 Articles
Emily est tombée dans le chaudron de la littérature quand elle était toute petite. Travaillant actuellement dans le monde du livre, elle est tout particulièrement férue de littérature américaine.

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