HISTORICO-FANTASTIQUE — Ça y est : c’est la fin. Avec la lecture de ce sixième et dernier tome, je tourne l’ultime page de l’épique saga de la famille Caskey. Six tomes, c’est beaucoup et en même temps, c’est passé bien vite !
Attention, cet article comporte des spoilers sur les cinq tomes précédents.
La saga Blackwater court de 1919 à 1970 : de profonds bouleversement chamboulent la famille Caskey, la ville de Perdido et même l’Amérique toute entière sur la période. Pluie marque une cassure profonde dans l’histoire des Caskey et, dans un véritable feu d’artifice narratif, Michael McDowell dit adieu aux Caskey, à Perdido et surtout, à Elinor, le personnage par qui tout a commencé.
Ce dernier roman se termine à la manière dont le premier a commencé : une construction en écho véritablement bien pense, qui contribue énormément à la profonde nostalgie qui étreint alors le lecteur. Ce tome introduit une nouvelle génération d’adultes chez les Caskey : mais le lecteur s’y attache moins qu’aux tout premiers membres de la famille. Du reste, sont-ils vraiment des Caskey, ces deux jeunes qui n’en ont jamais porté le nom ?
Michael McDowell a su trouver le moment parfait pour mettre le point final à sa saga : cinquante ans de la vie d’une famille et d’une communauté, c’était ambitieux, et le résultat est amplement satisfaisant. À l’image du clan, l’Amérique toute entière a évolué et le Perdido de 1919 n’a rien à voir avec son homologue des seventies.
Ce dernier volume renoue une dernière fois avec l’horreur, proposant des scènes atrocement effrayantes, avec des fantômes vengeurs et des manifestations surnaturelles terrifiantes. Cela fait plusieurs tomes que le lecteur a appris à ne pas redouter les étranges créatures qui hantent les flots de la Perdido. Toutes meurtrières qu’elles soient, ce sont leurs victimes qui sont les plus odieuses, quand elles quittent les limbes pour arpenter le domaine des vivants et revenir se venger. Deux scènes en particulier, qui verront la disparition de deux des piliers du clan, vous donneront des cauchemars (ô, terrible petit John Robert, mort depuis si longtemps, et pourtant encore et toujours là).
Que dire au moment de conclure ? On s’investit émotionnellement beaucoup dans la lecture d’une si longue saga : on a l’impression d’en connaître personnellement les personnages, on a tant arpenté en esprit les lieux de leur vie qu’on a le sentiment diffus d’y être allé en personne très longtemps auparavant, un peu comme un souvenir d’enfance un peu effacé… J’ai profondément aimé cette saga, qui combine tout ce que j’aime dans la littérature : l’Histoire avec un grand H, la fiction américaine, le destin d’une famille sur plusieurs générations, et l’irruption du fantastique. Merci Michael McDowell pour ces pages, et merci à Monsieur Toussaint Louverture pour cette découverte, et pour la sublime fabrication qui l’accompagne !
Blackwater VI – Pluie, Michael McDowell. Monsieur Toussaint Louverture, juin 2022. Traduit de l’anglais par Yoko Lacour avec la participation d’Hélène Charrier.
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