FICTION HISTORIQUE — Amo, amas, amarer : aimer … Cela rappellera peut-être de vieux restes de latin à certains d’entre nous ! Et c’est de ce verbe que l’héroïne du jour, Amara, tire ce pseudonyme, un peu ironique au vu de la situation. Bienvenue dans L’Antre des Louves, d’Elodie Harper.
Pompéi, en l’an 74 avant notre ère. Amara est une jeune fille d’origine grecque qui a été réduite en esclavage après la mort de son père et vendue à un lupanar sordide, l’Antre des Louves, dirigé par Félix, un homme violent et imprévisible. Vive, intelligente et débrouillarde, Amara est obligée de cacher ses talents pour survivre. Car en tant que prostituée, sa seule valeur réside dans le désir qu’elle peut susciter chez les hommes. Mais l’esprit d’Amara est loin d’être brisé et elle comprend vite que la cité a beaucoup d’opportunités à offrir à celles qui savent les saisir : la jeune femme commence alors à développer un plan pour échapper à son destin.
Jour après jour, elle arpente les rues avec ses camarades louves. Forgées dans l’adversité, elles trouvent du réconfort dans les rires et les rêves qu’elles partagent. Ensemble, elles vont essayer de gravir les échelons d’une société où les hommes détiennent le pouvoir. Car à Pompéi, tout a un prix. Mais combien va lui coûter sa liberté ?
Commençons par un léger bémol afin de terminer avec les points forts de ce roman. L’Antre des louves est un roman agréable et facile à lire, dans lequel on ne parvient malgré cela jamais à complètement s’immerger. Le style choisi par l’autrice est résolument moderne, ce qui induit un léger décalage d’époque et instaure une distance entre le lecteur et les protagonistes. Amara et ses consœurs sont abordées avec un angle un peu trop contemporain : elles détonnent donc quelque peu dans le paysage de l’époque, qui sert alors plus de prétexte à redécouvrir la cité, célèbre pour avoir été ensevelie quelques années plus tard lors de l’éruption du Vésuve. Les références à Pompéi sont nombreuses: Elodie Harper essaie ainsi d’utiliser et de replacer les nombreux graffitis mis à jour par les archéologues dans les différentes maisons closes de la ville, ainsi que le plan de la ville. L’intention est tout à fait louable, mais parfois un peu maladroite. Tout de même, quel plaisir d’arpenter la ville avec ses louves, de découvrir les villas des riches patriciens, le port, ou bien encore les célébrations des différents dieux.
Ceux qui ont eu la chance de visiter Pompéi le savent, les vestiges de la cité antique sont figés dans le temps. Parmi les splendides ruines de la cité, les archéologues ont identifié plus de 25 maisons closes, qui sont autant de témoignages sur la place de la prostitution (et par extension de la place des femmes) dans la société de l’époque. L’Antre des louves se veut le reflet sans fard de cet aspect de Pompéi : l’autrice n’hésite pas à décrire les vraies conditions de vie des louves, même si elles sont violentes et dégradantes, sans jamais rien édulcorer. Pour autant, ce livre ne tombe jamais dans un voyeurisme mal placé et ne place jamais le sexe en tant que tel au cœur de l’intrigue. Dans ce contexte, la sororité et l’amitié sans faille qui lient toutes ces femmes n’en sont que plus fortes et inspirantes, malgré la rivalité entretenue entre elles par Felix.
Même si ce tome peut éventuellement se suffire à lui-même, on sent bien que l’histoire d’Amara n’est pas finie, d’autant plus que l’intrigue a lieu à peine quelques années avant l’éruption du Vésuve, qu’il serait dommage de ne pas exploiter par la suite. L’Antre des louves est un roman prenant qui conjugue action, émotions et Histoire, sans oublier ses réflexions intéressantes sur la place des femmes dans la société. On conseille et on attend la suite de cette trilogie avec impatience !
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