POLAR ÉCOLO — Thierry Colombié est économiste, spécialiste du trafic de drogues et du grand banditisme, en plus d’être scénariste, réalisateur et auteur ! C’est en rencontrant des agents de l’OCLAESP (Office central de la lutte contre les atteintes à l’environnement et à la santé publique) que lui est venue l’idée de sa série romanesque Polar vert : des romans policier pour ados, conçus comme une série à suspense, et dont l’objectif est de sensibiliser à la protection de l’environnement et à la lutte contre les mafias vertes.
Après une première saison sur les côtes bretonnes, il entraîne Klervi, son héroïne, dans les Hautes-Pyrénées, sur les traces de l’ours.
Klervi a une adolescence mouvementée : impliquée dans un trafic de civelles en Bretagne, elle a accepté d’aider la gendarmerie à coffrer les têtes pensantes du réseau, espérant ainsi alléger sa peine. En attendant son procès, elle vit dans un camping dans les Pyrénées, sous la protection de Marceau, l’un des deux gendarmes qui chapeautaient son travail d’espionne. Elle s’y fait appeler Claire et, conformément à ce que lui a conseillé le juge, elle réalise un service volontaire dans une association de défense de l’environnement. L’ambiance au village n’est pas des plus sereines, un combat acharné entre les pro-ours et les anti-ours sévissant. En effet, la réintégration de l’ours n’est pas du goût de tout le monde, notamment des éleveurs, des chasseurs, mais aussi des trafiquants qui voient ainsi la forêt leur échapper. Or la situation dérape lorsqu’une ourse est tuée de façon barbare et son petit kidnappé…
Le roman commence in medias res, Claire étant en rando dans les estives, ces prés où l’on mène brouter les troupeaux durant l’été, et ne tardant pas à assister au meurtre très cruel de l’ourse. Dès lors, le suspense est à son comble, la jeune fille et ses amis se lançant à corps perdu dans une enquête des moins aisées, tant la vérité est difficile à accoucher. De fait, le mensonge est au coeur du récit : Claire vit sous une fausse identité, elle ment pour protéger un de ses amis (persuadé que son père fait partie des meurtriers), elle ment à la gendarmerie pour éviter d’avoir à témoigner sous son vrai nom, ses amis ont des réactions parfois louches, et que dire des adultes qui les entourent et ne font pas de la vérité une priorité absolue ?! Ces tissus de mensonges instaurent donc un suspense très prenant.
Toutefois, ils introduisent aussi quelques longueurs : qu’il s’agisse des personnages qui se répètent leurs mensonges, des tergiversations des uns et des autres, ou des sentiments de Klervi qui se languit des siens, on a parfois l’impression de tourner en rond.
Le propos écologique est bien mêlé à l’intrigue et aux péripéties. Celles-ci ne manquent pas de mettre à l’honneur la lutte des pro et des anti-ours, avec force manifestations, articles par voie de presse et autres actions coup de poing. Au passage, l’auteur évoque quelques projets industriels et ou écologiques qui visent la montagne (projets d’étude de la forêt, projet de méga-scierie), mais aussi quelques tensions propres à ce milieu et liées au tourisme, ou aux différents attraits que présente la frontière pour des agissements clandestins.
Le récit est mené d’un style très accessible, parfois volontairement télégraphique, ce qui accentue l’effet de rapidité dans l’enchaînement des révélations.
Le cycle est conçu comme une série dont les saisons sont indépendantes, aussi est-il possible de lire La Malédiction de l’ours sans avoir lu les deux tomes qui le précèdent : non seulement les éléments prégnants de la saison 1 sont rappelés dans un bref résumé en début d’ouvrage, mais en plus, Klervi, qui se trouve être la narratrice, revient assez souvent sur ses états d’âme. Au final, le plus surprenant est de constater, à la fin du récit, que ce tome 1 n’est en fait que la première partie d’un roman publié en deux volumes, et dont le premier s’arrête assez brutalement, en plein milieu d’un dialogue ! Effet cliffhanger garanti, mais un peu frustrant côté unité narrative.
Voilà un polar jeunesse au propos résolument vert, facile et rapide à lire, et dont on attend assez impatiemment la suite, tant la fin s’avère inattendue !
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