Avec sa couverture alléchante et son histoire originale, Le Prince d’été s’est invité sur de nombreux blogs et sur les réseaux sociaux, s’imposant comme LE livre jeune adulte qu’il fallait avoir lu ces derniers temps. Aussi, nous trouvions normal de vous en parler sur Café Powell. Malheureusement, malgré de bonnes idées originales et une fin réussie, la magie n’a pas pris.
Quatre cents ans après notre ère, le monde a bien changé. La guerre, et la maladie l’ont ravagé. Sur la côte de ce qu’on appelait autrefois le jadis, vit la communauté de Palmares Três, une ville-pyramide régie par des femmes. La reine choisit un roi d’été tous les cinq ans, qui vivra sous l’œil du peuple pendant une année avant d’être sacrifié afin que sa désignation de la prochaine reine soit irrévocable.
Notre héroïne dans ce monde dévasté s’appelle June, et c’est une artiste. Elle vit avec sa mère et sa belle-mère, qui occupe un poste au gouvernement et est donc une « tante », comme on appelle les hauts dignitaires de l’état. June est rebelle et prête à tout pour faire connaître son art. Elle passe la majeure partie de son temps avec son meilleur ami Gil, qui a été autrefois son amant. Cette année-là, le chouchou de June, Enki, va être élu roi d’été. Elle découvre en lui un artiste, comme elle et va tomber amoureuse de lui…mais Enki, lui, pose ses yeux sur Gil.
L’art et l’amour (libre) sont au centre de l’intrigue du Prince d’été : nous découvrons en effet la grande liberté des mœurs de Palmares Três, ce qui est complètement inédit pour un titre jeune adulte. Les personnages sont très souvent bisexuels et l’expression physique de leur amour ne prend pas quatre livres pour se concrétiser. C’est assez agréable de voir Alaya Dawn Johnson faire fi des codes en vigueur.
Le lecteur est donc étonné de la tournure que prennent les évènements : il y a triangle amoureux, ce qui n’est pas nouveau, mais ce triangle amoureux est différent, car la rivalité et la jalousie n’ont pas leur place au sein de ce trio. Gil et June se disputent tous deux les faveurs d’Enki, mais continuent de s’aimer d’un amour tendre et de partager leur amour de l’art. L’art, ici, transcende tout. June est prête à tout pour réaliser quelque chose d’unique, qui la consacrera comme artiste aux yeux du monde. L’art pictural, la musique, la danse ont donc une place de choix dans le récit.
L’univers crée par Alaya Dawn Johnson est donc riche et complexe, avec ses mœurs, ses traditions et un système politique abouti. On ressent très bien l’amour presque lancinant que June voue à Enki, et à Gil, mais on comprend bien moins facilement son attitude désagréable et révoltée à l’égard des adultes de son entourage.
Il est donc difficile de comprendre pourquoi, finalement, on ressort déçu de ce livre : pendant la première partie du récit, de nombreuses longueurs entravent cependant le récit. Heureusement, la fin de l’histoire est intense et très prenante, et rattrape un début un peu mou. Il est donc difficile de trancher quant à ce livre. Le mieux, c’est de vous laisser juger…
Le Prince d’été, Alaya Dawn Johnson. Robert Laffont (R), 2013.
Par Emily Vaquié